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les mille nuits et une nuit

deux jeunes gens si accomplis à la fois et si dénués d’ambition ! » Et le désir lui vint, irrésistible, de les visiter dans leur demeure, pour se mieux rafraîchir les yeux de leur vue. Et il s’en ouvrit tout de suite aux deux adolescents qui répondirent par l’ouïe et l’obéissance, et se hâtèrent de lui faire escorte. Et le prince Farid prit bientôt les devants pour aller avertir sa sœur Farizade de l’arrivée du sultan.

Et Farizade, qui n’était guère accoutumée à recevoir, ne sut comment s’y prendre pour faire dignement les honneurs de leur maison au sultan. Et, dans cette perplexité, elle ne trouva rien de mieux que d’aller consulter son ami Bulbul, l’Oiseau-Chanteur. Et elle lui dit : « Ô Bulbul, le sultan nous fait l’honneur de venir voir notre maison, et nous devons le régaler. Hâte-toi donc de m’enseigner comment nous pourrons nous en acquitter, de manière qu’il sorte de chez nous content ! » Et Bulbul répondit : « Ô ma maîtresse, il est inutile de faire préparer, par la cuisinière, des plateaux et des plateaux de mets. Car il n’y a qu’un seul plat qui convienne aujourd’hui au sultan, et il faut le lui servir. Et c’est un plat de concombres farcis de perles ! » Et Farizade fut étonnée, et, croyant que la langue de l’Oiseau lui avait fourché, se récria, disant : « Oiseau ! Oiseau ! tu n’y penses pas ! Des concombres farcis de perles ! Mais c’est un ragoût inouï. Si le roi nous fait l’honneur de prendre un repas chez nous, c’est sans doute pour manger, et non pour avaler des perles ! Tu veux certainement dire « un plat de concombres avec une farce de riz », ô Bulbul ! » Mais l’Oiseau-Parleur s’écria, impa-