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les mille nuits et une nuit

tes doigts les unes après les autres, comme si elles étaient collées, ce serait un signe que j’aurais subi le même sort que notre frère ! » Et Farizade, bien triste, dit en l’embrassant : « Fasse Allah, ô mon bien-aimé, qu’il n’en soit rien ! Et puisses-tu revenir dans la demeure avec notre grand ! » Et, à son tour, le prince Farouz prit la route qui conduisait vers l’Inde.

Et, le vingtième jour de son voyage, il trouva le Vieillard de l’Arbre, qui était assis, comme l’avait vu le prince Farid, l’index de la main droite levé à la hauteur de son front. Et, après les salams, le vieillard, interrogé, renseigna le prince sur le sort de son frère, et fit tous ses efforts pour le détourner de son entreprise. Mais, voyant qu’il ne viendrait pas à bout de son insistance, il lui remit la boule de granit rouge. Et elle le mena au pied de la montagne fatale.

Et le prince Farouz s’engagea résolument dans la montagne, et les voix s’élevèrent sur ses pas. Mais il ne les écoutait pas. Et aux injures, aux menaces et aux appels, il ne répondait pas. Et déjà il était parvenu au milieu de son ascension, quand il entendit soudain crier derrière lui : « Mon frère ! mon frère ! ne fuis pas devant moi ! » Et Farouz, oubliant toute prudence, se retourna à cette voix, et fut changé à l’instant en un bloc de basalte noir.

Et, dans son palais, Farizade qui ne quittait le chapelet de perles ni le jour ni la nuit, et en faisait sans cesse couler les grains sous ses doigts, s’aperçut aussitôt qu’ils n’obéissaient plus au mouvement qu’elle leur imprimait, et vit qu’ils s’étaient collés