Page:Le livre des mille nuits et une nuit, Tome 12, trad Mardrus, 1903.djvu/311

Cette page a été validée par deux contributeurs.
histoire de la princesse nourennahar…
305

rait complètement l’horizon, quand soudain, au pied même de l’un de ces rochers, j’aperçus ma propre flèche, non point enfoncée dans le sol par la pointe, mais couchée à une certaine distance de l’endroit où elle avait dû frapper. Et cette découverte me jeta dans une grande perplexité, au lieu de me réjouir. Car raisonnablement je ne pouvais m’imaginer que j’étais capable de lancer si loin une flèche. Et c’est alors, à mon père, que j’eus l’explication de ce mystère, et de tout ce qui m’était arrivé dans mon voyage à Samarcande. Mais c’est là un secret que je ne puis hélas ! te révéler sans manquer à mon serment. Et tout ce que je puis t’en dire, ô mon père, est que, depuis ce moment, j’oubliai et ma cousine et ma défaite et tous mes ennuis, et j’entrai dans la voie plane du bonheur. Et pour moi commença une vie de délices, qui n’était troublée que par l’éloignement où je me trouvais d’un père que j’affectionne par-dessus tout au monde, et par le sentiment que j’avais qu’il devait être dans l’inquiétude à mon sujet. Et je crus alors de mon devoir de fils de venir te voir et te tranquilliser. Et tel est, ô mon père, l’unique motif de ma venue ! »

Lorsque le sultan eut entendu ces paroles de son fils, et compris de la sorte qu’il possédait le bonheur, et rien de plus, il répondit : « Ô mon fils, que peut souhaiter de plus pour son enfant un père affectueux ? Certes ! j’eusse beaucoup mieux aimé te voir vivre dans ce bonheur, auprès de moi, lors de mes vieilles années, plutôt que dans un endroit dont j’ignore la situation et même l’existence. Mais au moins, mon fils, ne peux-tu m’apprendre où il faut