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farizade au sourire de rose
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ma race, à cause de la femme que j’ai épousée. C’est un monstre que j’ai pris pour mère de ma postérité ! Et il n’y a que la mort qui puisse en débarrasser ma demeure ! » Et il prononça contre la sultane l’arrêt de mort, et commanda à son porte-glaive de remplir son office. Mais lorsqu’il vit devant lui, affaissée dans les larmes et la douleur sans bornes, celle que son cœur avait aimée, le sultan sentit descendre en lui une grande pitié. Et, détournant la tête, il ordonna de l’éloigner et de l’enfermer, pour le reste de ses jours, dans un réduit, tout au fond du palais. Et, dès ce moment, la laissant à ses larmes, il cessa de la voir. Et la pauvre mère connut toutes les douleurs de la terre.

Et les deux sœurs connurent toutes les joies de la haine satisfaite, et purent goûter, sans trouble désormais, les mets et les pâtisseries que confectionnaient leurs époux.

Et les jours et les années passèrent, avec la même rapidité, sur la tête des innocents et sur la tête des coupables, apportant aux uns et aux autres la suite de leur destinée.

Or, lorsque les trois enfants adoptifs de l’intendant des jardins eurent atteint l’adolescence, ils devinrent un éblouissement pour les yeux. Et ils s’appelaient : l’aîné Farid, le second Farouz, et la fille Farizade.

Et Farizade était un sourire du ciel même. Ses cheveux étaient d’or d’un côté et d’argent de l’autre ; ses larmes, quand elle pleurait, étaient des perles qui tombaient ; ses rires, quand elle riait, étaient des dinars d’or qui tintaient ; et ses sourires, des