Page:Le livre des mille nuits et une nuit, Tome 12, trad Mardrus, 1903.djvu/103

Cette page a été validée par deux contributeurs.
histoire de kamar et de l’experte halima
97

reuse. Mais il n’en laissa rien voir au joaillier qui l’interrogeait sur la manière dont il avait dormi, et, après avoir pris congé de lui, il sortit pour aller rendre compte à la femme du barbier de ce qui s’était passé. Et, en regardant dans sa poche, il trouva un couteau qu’on y avait mis. Et il montra ce couteau à sa protectrice, en lui mettant cinq cents dinars d’or de gratification, pour son époux le barbier, ce pauvre ! Et la vieille, après lui avoir baisé la main, s’écria en voyant le couteau ; « Qu’Allah vous garde du malheur, ô mon enfant. Voici que ta bien-aimée est irritée et qu’elle te menace de te tuer, si elle te trouve encore endormi. Car c’est là l’explication de ce couteau-là trouvé dans ta poche ! » Et Kamar, fort perplexe, demanda : « Mais comment pourrais-je faire pour ne pas m’endormir ? Déjà j’avais bien résolu de veiller coûte que coûte, la nuit dernière, mais sans y avoir réussi ! » Elle répondit : » Eh bien, pour cela, tu n’auras qu’à laisser boire le joaillier seul ; et, feignant d’avoir vidé la coupe de sorbet dont tu auras jeté le contenu derrière toi, tu feras semblant de dormir en présence de l’esclave. Et de la sorte tu attendras le but désiré ! » Et Kamar répondit par l’ouïe et l’obéissance, et ne manqua pas de suivre exactement cet excellent avis.

Or, les choses se passèrent de la manière prévue par la vieille. Car le joaillier, sur le conseil de son épouse, invita Kamar pour le troisième souper, selon l’usage qui veut que l’hôte soit invité trois nuits de suite. Et lorsque l’esclave qui avait apporté les sorbets vit les deux hommes endormis, elle se retira pour annoncer à sa maîtresse que l’effet était produit.