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histoire du jeune nour avec la franque...
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ignominieuse, et emmenez-la pour la faire périr de la mort la plus cruelle ! »

Comme les bourreaux s’apprêtaient à se saisir de la princesse, le vieux vizir borgne s’avança en boitant jusque devant le trône et, après avoir embrassé la terre entre les mains du roi, dit : « Ô roi du temps, permets à ton esclave de formuler une prière avant la mort de la princesse ! » Le roi dit : « Parle, ô mon vieux vizir dévoué, ô le soutien de la chrétienté ! » Et le vizir dit : « Sache, ô roi, que ton esclave indigne est épris depuis fort longtemps des charmes de la princesse. C’est pourquoi je viens te prier de ne point la faire mourir et, comme seule récompense pour les preuves accumulées de mon dévouement aux intérêts de ton trône et de la chrétienté, de me l’accorder pour épouse. Et d’ailleurs je suis si laid que ce mariage, qui est une faveur pour moi, pourra servir en même temps de châtiment aux fautes de la princesse ! De plus je m’engage à la garder enfermée au fond de mon palais, à l’abri désormais de toute fuite et des entreprises des musulmans ! »

En entendant ces paroles de son vieux vizir, le roi dit : « Il n’y a pas d’inconvénient ! Mais que vas-tu faire, ô pauvre, de ce tison allumé aux feux de l’enfer ? Et ne crains-tu pas les conséquences cornufiantes de ce mariage-là ? Par le Messie ! moi, à ta place, je mettrais longtemps mon doigt à ma bouche pour réfléchir sur une affaire si grave ! » Mais le vizir répondit : « Par le Messie ! je n’ai guère d’illusions à ce sujet-là, et je n’ignore point la gravité de la situation. Mais je saurai agir avec assez de sagesse