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les mille nuits et une nuit

hors de la maison ? » Mais dès que Nour eut ouvert la bouche, sa mère s’aperçut qu’il était pris de vin et sentit l’odeur de son haleine. Et elle lui dit : « Ah ! malheureux Nour, qu’as-tu fait ? Si ton père vient à sentir ton odeur, quelle calamité ! » Car Nour, qui avait supporté la boisson tant qu’il était dans les bras de l’Égyptienne, avait été frappé par l’air vif du dehors, et sa raison disloquée le faisait tituber à droite et à gauche comme un ivrogne. Aussi sa mère se hâta-t-elle de l’entraîner vers son lit et de le coucher, en le couvrant chaudement.

Mais, à ce moment, arriva dans la chambre le marchand Couronne, lequel était un observateur fidèle de la loi d’Allah qui défend aux Croyants les boissons fermentées. Et, voyant que son fils était couché pâle et le visage fatigué, il demanda à son épouse : « Qu’a-t-il ? » Elle répondit : « Il souffre d’un violent mal de tête occasionné par le grand air dans ce jardin où tu lui avais permis d’aller se promener avec ses camarades ! » Et le marchand Couronne, bien ennuyé de ce reproche de son épouse et du malaise de son fils, se pencha sur Nour pour lui demander comment il allait ; mais il sentit l’odeur de son haleine, et, indigné, il secoua le bras de Nour et lui cria : « Comment, fils débauché ! tu as enfreint la loi d’Allah et de son Prophète, et tu oses entrer dans la maison sans purifier ta bouche ! » Et il continua à l’admonester durement.

Alors Nour, qui était dans un état d’ivresse complète, sans savoir au juste ce qu’il faisait, leva la main et envoya à son père, le marchand Couronne, un coup de poing qui l’atteignit à l’œil