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les mille nuits et une nuit

d’un vin couleur de pourpre, à une floraison de rubis sur un rameau d’émeraude.

Ô rose voluptueuse, mais si cruelle envers les amants grossiers qui te heurtent sans délicatesse, tu les punis, ceux-là, avec les flèches de ton carquois d’or !

Ô merveilleuse, ô réjouissante, ô délectable ! tu sais également retenir les raffinés qui t’apprécient ! Pour eux tu vêts tes grâces de robes de couleurs différentes, et tu restes la bien-aimée dont on ne se lasse jamais. »

En entendant cette louange admirable de la rose, les adolescents ne purent retenir leur enthousiasme, et poussèrent mille exclamations et répétèrent en chœur, en dodelinant de la tête : « Et tu restes la bien-aimée dont on ne se lasse jamais ! » Et celui qui venait d’improviser le poème vida aussitôt la corbeille et couvrit de roses ses hôtes. Puis il remplit de vin la grande coupe et la fit circuler à la ronde. Et le jeune Nour, lorsque vint son tour, prit la coupe avec un certain embarras ; car il n’avait jamais encore bu de vin, et son palais ignorait le goût des boissons fermentées comme son corps le contact des femmes. Il était vierge, en effet, et ses parents ne lui avaient point encore, vu son jeune âge, fait cadeau d’une concubine, comme c’est la coutume chez les notables qui veulent, avant le mariage, donner de l’expérience et du savoir, en ces questions, à leurs fils pubères. Et ses compagnons connaissaient ce détail de la virginité de Nour, et s’étaient promis, en l’invitant à cette partie de jardin, de l’éveiller de ce côté-là !