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les mille nuits et une nuit

son harem, ses armoires et ses coffres, remplis de somptuosités, d’habits de Mordîn, d’étoffes de Baâlbeck, de soieries de Homs, d’armes de Damas, de brocarts de Baghdad, de gazes de Mossoul, de manteaux du Maghreb et de broderies de l’Inde, n’avaient pas leurs pareils en magnificence dans les palais des rois et des sultans. Et il possédait, en grand nombre, des esclaves nègres et des esclaves blancs, des mamelouk turcs, des concubines, des eunuques, des chevaux de race et des mulets, des chameaux de la Bactriane et des dromadaires de course, des jeunes garçons de Grèce et de Syrie, des jouvencelles de Circassie, des petits eunuques d’Abyssinie, et des femmes de tous les pays. Et il était ainsi, sans aucun doute, le marchand le plus satisfait et le plus honoré de son temps.

Mais le bien le plus précieux et la chose la plus splendide que possédât le marchand Couronne, c’était son propre fils, jouvenceau de quatorze ans, qui était certainement plus beau, et de beaucoup, que la lune à son quatorzième jour. Car rien, ni la fraîcheur du printemps, ni les rameaux flexibles de l’arbre bân, ni la rose dans son calice, ni l’albâtre transparent, n’égalait la délicatesse de son adolescence heureuse, la souplesse de sa démarche, les tendres couleurs de son visage et la pure blancheur de son corps charmant. Et d’ailleurs le poète, inspiré de ses perfections, l’a ainsi chanté :

Mon jeune ami, qui est si beau, m’a dit : « Ô poète, ton éloquence est en défaut ! » Je lui dis : « Ô mon seigneur, l’éloquence n’a rien à voir dans notre cas !