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les mille nuits et une nuit

qui, à ce moment, était entouré de son grand-vizir Giafar, de Massrour et de plusieurs chambellans, au milieu du diwân. Et le khalifat, de voir en cet état d’affliction et d’égarement le même Aboul-Hassân qu’il savait d’ordinaire si jovial et si insouciant, fut à la limite de l’étonnement et de l’affliction et, interrompant la séance du diwân, il se leva de sa place et courut à Aboul-Hassân qu’il pressa de lui raconter la cause de sa douleur. Mais Aboul-Hassân, un mouchoir sur les yeux, ne répondit que par un redoublement de pleurs et de sanglots, pour enfin laisser échapper de ses lèvres, entre mille soupirs et mille feintes d’évanouissement, le nom de Canne-à-Sucre, disant : « Hélas ! ô pauvre Canne-à-Sucre ! hélas, ô modique de chance ! Que vais-je devenir sans toi ? »

À ces paroles et à ces soupirs, le khalifat compris qu’Aboul-Hassân venait lui annoncer la mort de Canne-à-Sucre, son épouse, et il en fut extrêmement affecté. Et les larmes lui vinrent aux yeux, et il dit à Aboul-Hassân, en lui posant le bras sur l’épaule : « Qu’Allah l’ait en sa miséricode ! Et qu’il prolonge tes jours de tous ceux qui ont été enlevés à cette douce et charmante esclave ! Nous te l’avions donnée pour qu’elle fût pour toi un sujet de joie, et voici maintenant qu’elle te devient une cause de deuil ! La pauvre ! » Et le khalifat ne put s’empêcher de pleurer à chaudes larmes. Et il s’essuya les yeux avec son mouchoir. Et Giafar et les autres vizirs et les assistants pleurèrent également à chaudes larmes, et s’essuyèrent les yeux comme l’avait fait le khalifat.

Puis le khalifat eut la même idée que Sett Zobéida ;