Page:Le livre des mille nuits et une nuit, Tome 10, trad Mardrus, 1902.djvu/133

Cette page a été validée par deux contributeurs.
les aventures de hassân al-bassri
129

envie sous le nombril ; une bouche comme une cornaline, qui dispense de la coupe et de l’aiguière ; des joues comme les anémones de Némân ; un ventre élastique et éblouissant, aussi vaste et aussi blanc qu’une cuve de marbre ; une croupe plus solide et mieux bâtie que la coupole du temple d’Iram ; des cuisses fondues dans le moule de la perfection, aussi douces que les jours de la réunion après l’absence amère, entre lesquelles est assis le trône du khalifat, sanctuaire du repos et de l’ivresse, et dont le logogriphe a été ainsi décrit par le poète :

» Mon nom, objet de tant d’émois, est composé de deux lettres fameuses ! Multipliez quatre par cinq et six par dix, et vous l’obtenez ! »[1]

Et, ayant dit ces paroles, Hassân ne put retenir ses larmes plus longtemps, et se mit à pleurer. Puis il s’écria : « Mon tourment, ô Splendeur, est aussi amer que le tourment du derviche qui a perdu son écuelle, ou la souffrance du pèlerin qui a une blessure au talon, ou la douleur de l’amputé qui a perdu ses jambes et ses bras ! »

Lorsque la vieille amazone eut entendu tout cela, elle baissa la tête un moment, plongée dans une profonde réflexion, puis elle dit à Hassân : « Quelle calamité, ô Hassân ! Tu te perds sans recours et tu me perds avec toi ! Car l’adolescente que tu viens de me dépeindre est certainement l’une des sept filles

  1. Le mot arabe Koss (le « Kussos » des Grecs) est composé de deux lettres dont la première, le Kaf, est représentée par 20, et la seconde, le Sin, par 60.