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les aventures de hassân al-bassri
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s’avança une amazone plus haute que toutes les autres, dont le visage était non point nu sous le casque, mais complètement recouvert de la visière baissée, et dont la poitrine, aux seins rebondissants, reluisait sous la protection d’une cotte de mailles d’or plus serrées que les ailes des sauterelles. Et elle arrêta sa cavale brusquement à quelques pas de Hassân. Et Hassân, ne sachant si elle lui était hostile ou hospitalière, commença par se jeter devant elle, le front dans la poussière, puis releva la tête et lui dit : « Ô ma souveraine, je suis un étranger que la destinée a conduit dans cette terre, et je me mets sous la protection d’Allah et sous ta sauvegarde ! Ne me repousse pas ! Ô ma souveraine, aie pitié du malheureux qui est à la recherche de son épouse et de ses enfants ! »

À ces paroles de Hassân, la cavalière sauta à bas de son cheval et, se tournant vers ses guerrières, d’un geste les congédia. Et elle s’approcha de Hassân, qui aussitôt lui baisa les pieds et les mains et porta à son front le bord de son manteau. Et elle l’examina avec attention ; puis, relevant sa visière, elle se montra à lui à découvert. Et Hassân, en la voyant, poussa un grand cri et recula épouvanté ; car au lieu d’une jeune femme pour le moins aussi belle que les guerrières adolescentes qu’il avait vues, il avait devant lui une vieille à l’aspect bien laid, qui possédait un nez gros comme une aubergine, des sourcils de travers, des joues ridées et tombantes, des yeux qui s’injuriaient l’un l’autre, et, dans chacun des neuf angles de sa figure, une calamité ! Ce qui faisait qu’elle ressemblait tout à fait à un cochon !