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les mille nuits et une nuit

que je veux t’offrir en présent pour que tu le conserves précieusement dans ton armoire. » Alors le roi dit au médecin : « Et quel est ce livre ? » Il répondit : « Il contient des choses inestimables, et le moindre des secrets qu’il révèle est celui-ci : Si tu me coupes la tête, ouvre le livre et compte trois feuilles en les tournant ; lis ensuite trois lignes de la page de gauche, et alors la tête coupée te parlera et te répondra à toutes les questions que tu lui poseras ! » À ces paroles, le roi s’émerveilla à la limite de l’émerveillement, et se trémoussa de joie et d’émotion, et dit : « Ô médecin !… Même si je te coupais la tête, tu parlerais ? » Il répondit : « Oui, en vérité, ô roi ! c’est bien là, en effet, une chose prodigieuse. » Alors le roi lui permit de s’en aller, mais entre des gardiens ; et le médecin descendit à sa maison et termina ce jour-là ses affaires, et le second jour aussi. Puis il remonta au diwan, et aussi vinrent les émirs, les vizirs, les chambellans, les nawabs[1] et tous les chefs du royaume, et le diwan devint comme un jardin plein de fleurs. Alors le médecin entra au diwan et se tint debout devant le roi, en tenant un livre très vieux et une petite boîte à collyre contenant une poudre. Puis il s’assit et dit : « Qu’on m’apporte un plateau ! » On lui apporta un plateau ; il y versa la poudre et l’étendit à la surface. Il dit alors : « Ô roi ! prends ce livre, mais ne t’en sers pas avant de me couper la tête. Lorsque tu l’auras coupée, pose-la sur ce plateau, et ordonne qu’on la presse contre cette poudre pour étancher le sang ; puis tu ouvriras le livre ! » Mais le roi, dans sa

  1. Les lieutenants du roi ou ses représentants.