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histoire du portefaix…
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porte de nouveau, et j’attendis que l’odeur devînt moins forte.

Alors j’entrai, et je trouvai une salle spacieuse, toute jonchée de safran, et illuminée avec des chandelles parfumées à l’ambre gris et à l’encens et par des lampes magnifiques en or et en argent contenant des huiles aromatiques qui rendaient en brûlant bette odeur forte. Et, entre les flambeaux d’or et les lampes d’or, je vis un merveilleux cheval noir qui avait une étoilé blanche sur le front ; et son pied gauche et sa main droite étaient tachetés de blanc à leurs extrémités ; sa selle était en brocart et sa bride était une chaîne d’or ; son auge était pleine de grains de sésame et d’orge bien criblé ; son abreuvoir contenait de l’eau fraîche parfumée à l’eau de roses. Et moi, ô ma maîtresse, comme ma grande passion était les beaux chevaux et que j’étais le cavalier le plus illustre de mon royaume, je pensai que ce cheval me conviendrait fort ; et je le pris par la bride et je l’amenai dans le jardin, et je montai dessus ; mais il ne bougea pas. Alors je le frappai au cou avec la chaîne d’or. Et aussitôt, ô ma maîtresse, le cheval étendit deux grandes ailes noires que je n’avais pas vues jusqu’à cet instant, cria d’une façon épouvantable, frappa trois fois le sol avec son sabot, et s’envola avec moi dans les airs.

Alors, ô ma maîtresse, la terre tourna devant mes yeux ; mais je serrai mes cuisses et je me tins comme un bon cavalier, et, enfin, le cheval descendit et s’arrêta sur la terrasse du palais en cuivre rouge où j’avais trouvé les dix jeunes hommes borgnes. Et alors il se cabra si terriblement et se secoua si vite