Page:Le livre des mille nuits et une nuit, Tome 1, trad Mardrus, 1918.djvu/219

Cette page a été validée par deux contributeurs.
histoire du portefaix…
191

le plus libertin et le plus gentil de tous. C’est pour ces motifs que nous ne pourrons jamais vivre sans toi. » Et je leur dis : « Mais dites-moi pourquoi vous devez me quitter. Car, moi non plus, je ne veux pas perdre la joie de ma vie en vous ! » Elles me répondirent : « Sache que nous sommes toutes les filles d’un roi, mais de mères différentes. Depuis notre puberté, nous vivons dans ce palais, et, chaque année, Allah conduit sur notre chemin un chargeur qui nous satisfait, et nous aussi de même ! Mais, chaque année, nous devons nous absenter durant quarante jours, pour aller voir notre père et nos mères. Et, aujourd’hui, c’est le jour ! » Alors je dis : « Mais, ô délicieuses, je resterai dans la maison à louer Allah jusqu’à votre retour ! » Elles me répondirent : « Que ton désir s’accomplisse ! Voici toutes les clefs du palais, qui ouvrent sur toutes les portes. Ce palais est ta demeure, et tu en es le maître. Mais prends bien garde d’ouvrir la porte de cuivre qui est au fond du jardin, sinon tu ne pourras plus nous revoir et il t’arrivera fatalement un grand malheur. Prends donc bien garde d’ouvrir la porte de cuivre ! »

À ces paroles, toutes vinrent m’accoler et m’embrasser l’une après l’autre, en pleurant et en me disant : « Qu’Allah soit avec toi ! » Et elles me regardèrent en pleurant, et elles partirent.

Alors moi, ô ma maîtresse, je sortis de la salle en tenant les clefs à la main, et je commençai à visiter ce palais, que jusqu’à ce jour-là je n’avais pas eu le temps de voir, tellement mon corps et mon âme avaient été enchaînés dans le lit aux bras de ces