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un mot du traducteur à ses amis

Dès leur venue elles furent délicatement dorlotées par les mains de la lustrale Doniazade, leur tante, qui grava leurs noms sur des feuilles d’or colorées d’humides pierreries, et les soigna sous le velours de ses prunelles jusqu’à l’adolescence dure, pour les épandre, voluptueuses et libres, sur le Monde Oriental éternisé de leur sourire.

Je les juge et les donne telles, en leur fraîcheur de chair et de roche.

Car… une méthode, seule, existe, honnête et logique, de traduction : la littéralité, impersonnelle, à peine atténuée pour juste le rapide pli de paupière et savourer longuement… Elle produit, suggestive, la plus grande puissance littéraire. Elle fait le plaisir évocatoire. Elle recrée en indiquant. Elle est le plus sûr garant de vérité. Elle plonge, ferme, en sa nudité de pierre. Elle fleure l’arome primitif et le cristallise. Elle dévide et délie… Elle fixe.

Certes, si la littéralité enchaîne l’esprit divaguant et le dompte, elle arrête l’infernale facilité de la plume. Je ne m’en plaindrai pas. Car où trouver chez un traducteur le génie simple, anonyme ! et libéré de la niaise manie de son nom ?… Mais pour les difficultés du terroir originel, si dures au professionnel en thème, elles ne sauraient, aux doigts de l’amoureux de l’oriental babil, se concentrer en plus de