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les mille nuits et une nuit

C’est alors qu’il était venu employer cette ruse, dont j’ai parlé, auprès des tailleurs.

Il entra donc brusquement chez moi, de dessous terre, et aussitôt, sans perdre un instant, il m’enleva ! Il s’envola et s’éleva dans les airs ; puis il descendit et s’enfonça dans la terre ! Quant à moi, je perdis toute connaissance. C’est alors qu’il entra avec moi dans le palais souterrain où j’avais goûté la volupté. Et je vis l’adolescente toute nue, et le sang qui coulait de ses flancs ! Alors mes yeux furent mouillés de larmes. Mais l’éfrit se dirigea vers elle et, l’empoignant, lui dit : « Ô débauchée ! le voici, ton amant ! » Alors l’adolescente me regarda et dit : « Je ne le connais point. Et je ne l’ai jamais vu qu’en ce moment-ci seulement. » Et l’éfrit lui dit : « Comment ? Voici devant toi le corps même du délit et tu n’avoues pas ! » Alors elle dit : « Je ne le connais pas. Et de ma vie je ne l’ai vu. Et il ne me convient pas de mentir à la face d’Allah ! » Alors l’éfrit lui dit : « Si vraiment tu ne le connais point, prends ce sabre et coupe-lui la tête ! » Alors elle prit le sabre, vint à moi et s’arrêta en face de moi. Alors, moi, jaune de terreur, je lui fis un signe négatif avec mes sourcils (pour la prier d’avoir pitié) et mes larmes coulaient le long de mes joues. Alors elle aussi me cligna de l’œil ; mais elle dit à haute voix : « C’est toi qui es la cause de tous nos malheurs ! » Alors, moi, de nouveau je lui fis signe avec mes sourcils, et de ma langue je lui dis des vers à double sens (que l’éfrit ne pouvait bien comprendre) :

Mes yeux savent assez te parler pour que ma