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gissant à l’ombre des forêts ? Le mirage crée de ces illusions qui s’évanouissent, quand on les approche. Et quel Moïse opérerait ces miracles ?

Ces considérations avaient tant de poids qu’elles s’imposaient à la froide raison. Le départ ne fut résolu que par des motifs de foi surnaturelle par une ferme confiance dans l’aide de Dieu.

Le premier convoi était composé de quarant-deux mille trois cent soixante personnes, sans compter sept mille trois cent trente-sept serviteurs ou servantes[1]. Il avait à sa tête Zorobabel, fils de Salathiel, héritier légitime du trône de David, et le grand prêtre Josué, fils de Josédec.

Ce qui prouve que la foi religieuse animait toute l’entreprise, c’est qu’on songea tout d’abord à rebâtir le temple de Iahvé, et la pureté de cette foi se manifesta aussitôt par une attitude qui donna le ton à toute la restauration.

Les Judéens revenus avaient tout intérêt à ménager leurs voisins du nord, population mélangée d’anciens habitants et de clans transportés par Assarhaddon, après la chute de Samarie. Il leur était aisé de trouver un prétexte à fraterniser dans l’adoption par ces étrangers du culte de Iahvé, acclimaté depuis des siècles au pays de Canaan. Et de fait ces Samaritains s’empressèrent d’offrir leur concours pour relever le temple de Jérusalem. Eux-mêmes n’avaient pas songé à une pareille entreprise, faute de ressources et d’une ardente conviction. Le sanctuaire de Jérusalem serait commun à tout ce qui restait d’Israël et de Juda, et même aux colons étrangers.

— Ne serait-ce pas l’accomplissement des prophéties sur la réunion de tous les fils d’Israël exilés ?

Et cependant la proposition parut suspecte. Le péché des ancêtres, cause reconnue de la ruine, c’était précisément d’avoir associé au culte de Iahvé des divinités étrangères. Les collaborateurs bénévoles étaient infectés de ce mal. N’exigeraient-ils pas ensuite des chapelles dans le Temple pour leurs anciennes divinités d’Assyrie ? Ils avouaient ne pas descendre de Jacob. La réponse fut donc inexorable :

« Il ne convient pas que vous et nous, nous bâtissions ensemble la maison de notre Dieu ; mais nous la bâtirons nous seuls à Iahvé, le Dieu d’Israël, comme nous l’a ordonné le roi Cyrus, roi de Perse »[2].

Le roi Cyrus eût été sans doute fort indifférent à une plus large

  1. Ces transplantations de nations qui ont longtemps paru invraisemblables se sont opérées sous nos yeux à la suite de la grande guerre, en particulier quand des groupes de Grecs installés en Asie Mineure ou en Thrace, dûment reconnus et enregistrés, ont été transportés en Grèce. Le texte d’Esdras a d’ailleurs soin de dire que de nombreux émigrants ne purent établir leurs titres d’origine israélite. — Esdr., ii, 64 s.
  2. Esdr., iv, 3.