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En comparant les Pharisiens aux Stoïciens, Josèphe pensait les honorer aux yeux des Grecs et des Romains ; il ne songeait pas à pousser la comparaison trop loin : le panthéisme des Stoïciens, s’accommodant du culte des dieux, même idolâtrique, devait lui faire horreur. Mais l’élévation morale du Portique lui a paru proche de la rigueur des Pharisiens, et son déterminisme absolu prétendait ne pas exclure l’autonomie de la volonté ; il devait aussi lui être sympathique par son dogme de la Providence. Il n’a pas cependant cédé à la tentation de comparer les Sadducéens aux Épicuriens pour imiter l’opposition des deux sectes grecques. Il eût cru leur faire une injure imméritée, car les Épicuriens furent toujours chez les Juifs le type des impies.

Après cela, si l’on ne connaissait le procédé de l’historien qui suit successivement des sources d’un esprit tout différent, et sans prévenir, à moins qu’il ne proteste contre l’allégation qu’il veut cependant faire connaître, on serait étonné de trouver sous sa plume un jugement sur les Pharisiens qui reflète l’hostilité ironique d’un courtisan d’Hérode, de Nicolas de Damas très probablement[1] :

Ant., XVII, i, 4 : Il y avait une faction parmi les Juifs de gens très fiers de leur exacte connaissance de la loi ancestrale. Comme ils se donnaient pour agréables à Dieu, le sexe féminin leur était soumis : on les nomme Pharisiens ; ce sont les plus capables de résister à un roi, avisés, assez hardis pour faire une opposition ouverte et néfaste.

Les Pharisiens sont encore donnés comme un parti religieux, mais qui n’hésiterait pas à se lancer dans une intrigue politique. Josèphe avait lui-même signalé comment ils avaient abusé cruellement de la faveur d’Alexandra. Il n’eût peut-être pas écrit ces lignes, mais, les trouvant dans sa source, il ne les a pas désavouées.

§ 1. — Les Pharisiens[2].

Grâce aux textes spéciaux de Josèphe, et surtout à son histoire, nous pouvons nous faire une idée nette des Pharisiens avant le temps où ils apparaissent avec un si vif éclat dans l’Évangile. On peut même dire qu’ils n’ont pas changé jusqu’à nos jours il n’existe pas dans l’histoire de parti aussi fidèle à lui-même et au rôle qu’il s’est assigné.

  1. Le texte de Niese est inintelligible, mais on peut établir un très bon texte avec l’apparat de la grande édition, en lisant avec Schürer προσποιουμένοις au lieu de προσποιουμένων οἷς.
  2. Études les plus récentes : The Pharisees and their teachings, by Jacob Z. Lauterbach (Hebrew Union college Annual VI (1929) p. 69-139), panégyrique des Pharisiens, plus universalistes que le Christianisme ; ils n’ont pas témoigné d’hostilité à Jésus ; cf. RB., 1931, p. 104 (Dhorme). — Finkelstein, L. : The Pharisees, their origin and their Philosophy, Harvard theol. Rev. july 1929. Les Pharisiens sont des citadins, les Sadducéens des gens de la campagne ; cf. Theol.Litz. 1930 p. 583 (W. Baumgartner).