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avec les autres[1], tantôt qu’elle s’accorde en général avec la doctrine des Pharisiens[2].

C’est avouer qu’elle n’avait rien en propre, comme il le dit encore, qu’un extrême esprit d’indépendance. Par là les partisans de Judas ressemblaient aux Cyniques, mais ils n’avaient pas leur indifférence pour les intérêts de la cité. Bien au contraire, nationalistes farouches, ils confondaient les intérêts de Dieu avec ceux de la nation.

Attachés, comme les Pharisiens, à la religion et à la Loi, ils professaient en outre que c’était les trahir que de servir des maîtres étrangers. Josèphe, si embarrassé pour en faire une école de philosophie, a parfaitement compris leurs tendances et leur rôle. Il en jugeait d’après le résultat qu’il avait eu sous les yeux, et peut-être n’a-t-il jamais été plus clairvoyant que lorsqu’il a vu dans l’entraînement croissant du peuple vers ces opinions extrêmes la cause de la catastrophe finale. D’autant que ces anarchistes, quand ils ont tenu le pouvoir, se sont montrés les plus sanguinaires des tyrans, indomptés dans leurs caprices de souverains comme dans leurs aspirations à la liberté nationale.

Judas s’était adjoint un Pharisien, nommé Saddoq. Ils faisaient espérer l’intervention de Dieu : « De là naquirent des séditions et des assassinats politiques, tantôt de concitoyens, immolés à la fureur qui les animait les uns contre les autres et à leur passion de ne pas céder à leurs adversaires, tantôt d’ennemis »… Judas et Saddoq « remplirent le pays de troubles immédiats et plantèrent les racines des mœurs qui y sévirent plus tard. c’est la faveur de la jeunesse pour leur secte qui fut cause de la ruine du pays »[3].

C’est à cette dernière période du mal que l’on nomma Zélotes[4] ces partisans animés de zèle pour le Règne de Dieu, un règne qu’ils prétendaient hâter par la violence, la satisfaction de leurs appétits, une domination tyrannique, et aussi par un courage intrépide, le mépris des supplices et de la mort. Les descendants de Judas le Galiléen se montrèrent fidèles à son esprit et héritiers de son génie de l’insurrection.

A Masada, dernier abri de l’indépendance, le chef était « Éléazar, descendant de Judas qui avait persuadé à tant de Juifs de ne pas subir le recensement lorsque Quirinius fut envoyé comme censeur en Judée »[5].

  1. Bell., II, viii, 1.
  2. Ant., XVIII, i, 6.
  3. Ant., XVIII, i, 1.
  4. Bell., IV, iii, 9 s. ; v, 1 ; vi, 3 ; VII, viii, 1. A l’époque antérieure le mot ζηλωτής fut sûrement susceptible d’une acception plus noble, au sens de zélé pour la religion (Lc., vi, 15 ; Act., i, 3), comme aussi dans Sanh., ix, 6. L’hébreu קַנָּא est en araméen קַנְאָנָא, d’où Καναναῖος (Mt., x, 4 ; Mc. iii, 18).
  5. Bell., VII, viii, 1.