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qu’Hérode se déclarât et se compromît pour le perdre irrémédiablement dans l’esprit d’Antoine. Elle fut donc très pressante. Hérode vit le danger, et se demanda à son tour s’il ne profiterait pas de cette occasion pour faire disparaître la reine. Le jeu lui parut trop dangereux. Il la laissa partir comme elle était venue, plus irritée que jamais, et non plus seulement comme reine.

Ce n’est pas tout le drame. Cette comédie avait été précédée d’une tragédie.

Avant son départ, Hérode, inquiet, avait confié Mariamme à son oncle Joseph, qui était aussi son beau-frère, ayant épousé sa sœur Salomé, une autre de ces femmes qui firent sa destinée. Amant passionné de son épouse, avec la jalousie frénétique d’un despote oriental, Hérode avait ordonné à Joseph de la tuer s’il apprenait que lui-même avait succombé dans sa démarche auprès d’Antoine.

Précisément le bruit courut à Jérusalem que le roi était tombé en disgrâce et avait été exécuté. Prises de panique les femmes tentèrent de se réfugier auprès de la légion romaine qui séjournait près de Jérusalem afin d’appuyer le pouvoir mal affermi de l’élu des duumvirs et du Sénat. Joseph perdit la tête et avoua à Mariamme la consigne qu’il avait reçue, sans oser l’exécuter.

Salomé crut à une faiblesse de son mari pour Mariamme et l’accusa auprès d’Hérode à son retour. Mariamme protesta de son innocence avec l’accent de la vérité, mais trop assurée d’avoir reconquis son mari, elle lui demanda si l’ordre de la faire tuer était aussi une marque d’amour. Elle avait donc été avertie par Joseph ; ils étaient donc complices ! Telle fut la conviction du tyran. Il aimait trop sa femme pour sévir contre elle, mais il fit périr Joseph secrètement et jeta Alexandra en prison[1]. Dès lors la dissension intestine s’étendit jusqu’au couple royal. La jalousie ne cessa plus de ronger le cœur d’Hérode.

Cependant les événements exigeaient toute sa sollicitude. La guerre se préparait entre Octave et Antoine au printemps de l’an 31, et Hérode était nécessairement engagé dans le camp d’Antoine moins par la reconnaissance que par la situation géographique de son état entre l’Asie et l’Égypte de Cléopâtre. Il se disposait donc à joindre ses troupes à celles de son protecteur, s’il n’était même déjà en route[2].

  1. Otto, après Destinon, relègue au rang des fables l’ordre donné à Joseph, comme un doublet légendaire de ce que nous rencontrerons plus tard, et aussi la dénonciation à Hérode qui en dépend. Il y aurait eu une explosion en faveur des Asmonéens, que Joseph n’aurait pas su réprimer, d’où sa perte. Mais dans cette hypothèse, comment Alexandra conçut-elle le dessein de se réfugier auprès des Romains ? Il faudrait encore nier avec Otto qu’elle ait été mise en prison ! Tout se tient dans l’histoire de Josèphe.
  2. Plut., Ant., c. lxi et § 111 : ὑποστρέψας Ἡρώδης.