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Les chrétiens n’ont sûrement pas inventé cette histoire[1] : que leur importait que le mauvais roi ait été Iduméen ou Ascalonite d’origine ? De toute façon ces sources nous disent qu’Antipater fut formé selon les mœurs de l’Idumée. Un demi-juif, c’est bien ce que fut Hérode toute sa vie, avec un attachement sincère à sa nouvelle patrie, fondement de sa grandeur, sinon au judaïsme religieux que ses ancêtres n’avaient adopté que par force.

Nous suivrons l’usage qui divise la vie d’Hérode en trois périodes : celle de l’affermissement de son pouvoir (37-27), celle de sa prospérité, (28-14), enfin celle de la décadence de sa fortune (14-4). On serait tenté de traiter séparément de sa politique extérieure, de sa politique intérieure et religieuse, de ses affaires de famille. Mais sa politique extérieure se résume en un mot : tout sacrifier à l’amitié de celui qui étant le maître de l’empire romain était aussi le sien. Ses rapports avec Antoine et avec Auguste furent le plus souvent régis par ses difficultés domestiques. Ce qu’il fit à l’intérieur, sauf ses constructions magnifiques, lui fut très souvent aussi imposé par sa situation personnelle.

De sorte que son histoire ressemble à la biographie d’un homme toujours aux prises avec des embarras de famille, engagé dans des intrigues ourdies par les femmes de son entourage, poussé par ses passions à des solutions qu’il eût évitées par politique. Ce caractère romanesque de sa biographie en a rendu quelques traits suspects[2]. Même on les réduit pour aboutir à quelques lignes qui ne permettent pas de reconstituer une vie ardente et active, comme fut celle d’Hérode. C’est un fait que si l’on ne s’arrête à ces tragédies du palais, il ne reste presque rien, car tout en dépend dans l’existence de ce parvenu. Il n’y a rien là d’invraisemblable. N’est-il pas assuré, quoi qu’on dise, que la passion d’Henri VIII pour Anne de Boleyn a donné une nouvelle direction à sa vie et aux destinées religieuses de l’Angleterre ? Le nœud fatal de la vie d’Hérode fut son mariage avec Mariamme, la fille des Asmonéens. Ses fiançailles furent longues, comme s’il avait hésité. Il se décida enfin, moins peut-être par politique que par un attachement passionné. Quelques historiens louent encore son habileté. Il pouvait ainsi se présenter au peuple juif et à Rome comme le représentant d’une famille longtemps aimée, et si Rome y voyait une garantie de stabilité dans le pouvoir, la Judée se disait que le mari de Mariamme aurait quelque souci de l’indépendance nationale ; par elle des descendants des Asmonéens remonteraient sur le trône. N’était-il pas avisé de diviser ainsi un parti puissant, et dont il n’aurait jamais triomphé, malgré son énergie, sans les légions de Sossius ? Désormais il n’était plus parvenu, étranger par le

  1. Que Justin dit acceptée par les Juifs.
  2. Ainsi raisonne Otto, très sceptique sur beaucoup de points.