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tion aurait été prononcée si Hyrcan n’avait reçu l’ordre de Sextus César, gouverneur de Syrie, de ne pas toucher à Hérode. On lui conseilla donc de se dérober au jugement par la fuite. Après quoi Sextus le nomma préfet de Cœlésyrie et le mit en état de marcher contre Jérusalem. Antipater seul eut assez d’autorité sur son fils pour le renvoyer dans son domaine de Galilée.

César fut assassiné aux ides de mars de l’an 44. Les provinciaux le pleurèrent, mais personne plus que les Juifs de Rome qu’on voyait se lamenter jour et nuit auprès de son bûcher[1].

Les Juifs de Judée et la maison d’Antipater avaient encore plus sujet de gémir, mais il eût été imprudent de témoigner des regrets. Cassius, un des meurtriers, était maître de l’Orient. Il avait besoin d’argent, et imposa aux Juifs une contribution de sept cents talents. Les habitants d’Emmaüs, de Lydda, de Thamna et de Gophna qui s’y refusèrent furent vendus comme esclaves. Les défenseurs de la liberté romaine avaient la main lourde pour les provinciaux. Hérode fut le premier à payer et montra tant d’empressement à gagner les bonnes grâces de Cassius qu’il fut nommé de nouveau préfet de Cœlésyrie. C’était sur lui que reposaient désormais les destinées de sa famille. Antipater, toujours si avisé, et dans cette occasion trop généreux, ne sut pas comprendre la haine implacable que nourrissait contre lui un certain Malichos, résolu à le supplanter dans la faveur d’Hyrcan : il périt empoisonné à la table du grand prêtre. On doit lui rendre cette justice que, s’il empiéta sur les pouvoirs de son souverain, il y était presque contraint par l’incapacité du bonhomme, et qu’il ne cessa de lui témoigner des égards. Son fils Hérode devait être moins scrupuleux.

Malichos n’était qu’un aventurier. Antigone, fils d’Aristobule, qui avait pris les armes, était pour Hérode un rival plus redoutable. Cassius, défenseur de l’aristocratie à Rome, avait installé en Orient des tyrans pour soutenir sa cause. Deux d’entre eux, Ptolémée de Chalcis et Marion de Tyr prirent le parti du prince asmonéen, le premier parce qu’il avait épousé sa sœur, le second dans le dessein de s’agrandir, et en effet il s’empara de trois forteresses de Galilée. Hérode entra lui aussi en campagne, coupa le chemin à Antigone en route pour la Judée, le battit, et pénétra avant lui à Jérusalem. Déjà marié une femme d’assez bonne condition, Doris[2], qui lui donna Antipater, il se fiança à Mariamme,

  1. Suétone, Caesar, 84 : In summo publico luctu exterarum gentium multitudo circulatim suo quaeque more lamentata est, praecipue Judaei, qui etiam noctibus continuis bustum frequentarunt.
  2. Iduméenne d’après W. Otto (Pauly-Wissowa), mais, d’après Josèphe, d’une famille de Jérusalem (Bell., I, xxii, 1). S’il la nomme δήμοτις dans Ant., XIV, xii, 1, c’est sans doute pour dire qu’elle n’était pas étrangère : dans Bell., I, xii, 3, ἦκτο γυναῖκα τῶν ἐπιχωρίων οὐκ ἄσημον. Il est vrai qu’on aimerait à supposer que « de Jérusalem » est une faute de copiste pour « de l’Idumée ».