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Émath, la frontière la plus lointaine de la Terre Promise. Ne comptant que sur le bon succès d’une surprise, mais déçus par la vigilance de Jonathan, les Syriens se dérobèrent en franchissant un autre fleuve Éleuthère, c’est-à-dire le Nahr-el-Kébir[1] au nord de Beyrouth. L’ennemi principal lui ayant échappé, Jonathan se contenta de piller les Arabes voisins de Damas. Ce ne fut sûrement pas sans fierté qu’il se montra dans cette illustre et ancienne capitale. Rentré à Jérusalem après une campagne glorieuse pour le compte d’Antiochus VI, Jonathan aurait eu mauvaise grâce à lui enlever la citadelle de Jérusalem : c’eût été découvrir son jeu. Mais il fortifia la ville, qui était à lui, et beaucoup d’autres places fortes, pour se mettre à l’abri en toute éventualité.

Le revers vint du côté où il ne l’attendait pas. Tryphon qui rêvait de supplanter son jeune roi crut prudent de se débarrasser d’abord de Jonathan et se dirigea vers Bethsan[2], place importante où la plaine d’Esdrelon descend vers la vallée du Jourdain. Il nous paraît probable qu’il espérait entraîner Jonathan à la révolte, car si celui-ci vint le rejoindre avec quarante mille hommes, c’est sans doute qu’on lui avait fait entendre qu’une expédition importante était en vue. Mais Jonathan ne soupçonnait rien de la trahison.

Ce zèle et ce loyalisme effrayèrent Tryphon. Le perfide Syrien essaya de persuader à Jonathan qu’il y avait eu un malentendu et le décida à renvoyer son armée. Son désir de le séduire perce cependant encore dans l’offre qu’il lui fit de lui livrer Ptolémaïs « et les autres places fortes », c’est-à-dire celles de la côte qui étaient déjà en principe confiées à Simon. Avec une simple escorte Jonathan se montrerait plus docile. Et comme Tryphon ne vit décidément aucune chance de l’attacher à sa cause, il voulut du moins s’assurer de sa personne. Les deux généraux étaient arrivés à Ptolémaïs, et déjà Jonathan avait mis son armée sur la voie du retour. Les portes de la ville se refermèrent sur la petite escorte de Jonathan qui fut massacrée, pendant que lui même était gardé comme otage. Le gros de l’armée parvint à regagner Jérusalem (143).


§ 2. Simon grand prêtre, stratège et ethnarque des Juifs (143-134).


Simon, frère de Jonathan, se saisit aussitôt du pouvoir, avec un simulacre d’élection comme après la mort de Judas. Le deuil était profond, mais l’état des affaires n’inspirait pas d’inquiétudes. Le parti des apostats était réduit à l’impuissance. Il s’agissait de combattre contre des étrangers pour l’autel et les foyers.

  1. Comme le P. Abel l’a montré (RB.,1926, p. 215 ss.).
  2. Aujourd’hui Beisan, devenue célèbre par ses fouilles ; cf. RB., 1929, p. 85 ss. ; 555 ss.