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de violon. Sur la première page était représente un jeune artiste, le violon sous le menton, tenant son archet d'une main et le manche de son instrument de l'autre, le corps droit, un pied un peu avancé, selon les vrais principes de l'art. L'enfant rayonnait de joie.

« Je ne tiens pas mon violon comme cela! se dit-il. Je vais essayer tout de suite de faire comme lui nous verrons si cela ira mieux.»

Et il reprit son instrument, et s'appliqua à copier la pose de la gravure. Il obtint un son beaucoup meilleur que de coutume, quoiqu'il eût un peu de peine à ne pas s'écarter de son modèle. Il étudia quelque temps, de plus en plus content du résultat, et enfin, fatigue, il se rassit, reprit son cahier et tourna la pnge. Hélas! son bonheur finit là. Plus d'images rien que des lettres, des mots des lignes, des points noirs, une foule de signes inconnus. Les mots en donnaient l'explication, sans doute mais il aurait fallu comprendre ce que disaient les mois, et le pauvre Ambroise ne savait pas lire! Il ne savait pas lire! il ne pourrait jamais rien apprendre! il ne serait jamais qu'un ménétrier ordinaire, jouant toujours les mêmes airs, et les jouant à force de les avoir entendus! Il lui sembla que tout devenait noir autour de lui, et qu'il n'y avait pas au monde de bonheur pour ceux qui ne savaient pas lire. Il repoussa le livre qui tomba par terre, mit ses coudes sur ses genoux, sa figure dans ses mains, et fondit en larmes.

Il était là depuis quelque temps, songeant avec rancune que sa mère ne l'avait pas envoyé à l'école, parce qu'il était trop faible. Il oubliait qu'elle n'y avait pas davantage envoyé son frère qui était très-fort, parce qu'elle s'était dépêchée de le faire travailler aux champs, dès qu'il avait été capable d'arracher les mauvaises herbes. Il était donc là, toujours pleurant, lorsqu'il crut sentir quelqu'un près de lui et au même moment deux petites mains. se posèrent sur les siennes et cherchèrent à les écarter de son visage, pendant qu'une petite voix compatissante lui disait

« Qu'as-tu? Tu pleures? Es tu malade? Oh! je devinais bien qu'il t'était arrivé quelque chose. Je suis venue ici parce que je pensais que tu y serais, puisqu'il n'y avait pas de préveil aujourd'hui. En arrivant je t'ai entendu jouer, et tu jouais très bien et puis je n'ai plus rien entendu. J'ai attendu un peu pour ne pas te déranger, et puis j'ai été inquiète et je suis venue voir pourquoi tu ne jouais plus. Qui est-ce qui t'a fait du chagrin"?

Je suis bien malheureux, ma pauvre Véronique! Vois, on m'a donné un livre où l'on trouve tout ce qu'il faut savoir pour devenir un grand violoneux, et je ne sais pas lire pour comprcn lre ce qu'il y a