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qu'on nomme comète de Biéla ou de Gambart (du nom des astronomes qui l'ont, lut) découverte, l'autre calculée), devait passer cette année-là par un point du ciel appartenant précisément à l'orbite terrestre. Ue là grand émoi. Qu'allait-il se passer si les deux astres se rencontraient? Le choc ne bouleverserait- il point notre globe? La lumière de la comète n'allait elle point en embraser tout au moins la surface ?

Questions bien naturelles, vous en conviendrez. Cependant ceux qui les faisaient ne s'étaient pas dit ou ignoraient que si les deux orbites se croisaient, le moment du passage n'était ni ne devait être le même. Et, en effet, quand la comète se trouva au rendez- vous supposé, la Terre y avait pasé un mois auparavant. Or, nous naviguons dans le ciel avec la vitesse de 29 kilomètres environ par seconde il v a Sii 100 secondes dans un jour, et dès lors en 30 jours (si vous voulez vous donner la peine de faire un tout petit, calcul) notre Terre se trouvait en avant de la comète de 7o 108 000 kilomètres à peu près, c'est-à-dire à une distance de l'astre redouté de près de 1 9 millions de lieues.

On en fut quitte pour la peur. Ce n'est pas pour rien que je vous parle de la comète de Biéla. Reportez-vous en effet au récit de la pluie d'étoiles filantes du 27 novembre; vous y verrez que c'est très probablement cet astre même dont la Terre, celle fois, a fait la rencontre. Comme la comète de Biéla met six ans trois quarts à tourner autour du Soleil, on devait la revoir en 1839 les circonstances étant défavorables, on ne l'a point revue; puis en 1846. A cette dernière époque, la comète fit son apparition au moment annoncé mais chose curieuse, dans l'intervalle de ces treize ans et demi, elle avait sulii une étrange métamorphose elle s'était divisée en deux fragments. Voici, d'après un célèbre astronome rus<e. Struve, quel en était l'aspect. (Voy. la figure,

En 1852, même apparence. Mais les deux sœurs jumelles s'étaient éloignées l'une de l'autre leur distance, de 60 000 lieues seulement en 1846 s'élevait alors à un demi million de lieues. Qu'est-il arrivé depuis? On ne sait viil, car ni en IH.J'Jnien IKli.'i, ni enfin en 1872 on n'a pu revoir ni l'une ni l'autre.Mais on a calculé la posilion que les deux comètes devaient occuper l'automne dernier, et il 1 j résulte de ces calculs qu'à la date du 27 novembre, c'est du point du ciel d'oîi parlaient en rayonnant les étoiles (liantes de cette nuit, que devait se trouver, à peu de chose près, l'un des fragments. D'où la conclusion que les étincelles de ce bouquet d'artifiee étaient tout simplement des parties intégrantes de l'astre nébuleux. La rencontre a-l- elle eu lieu au beau milieu du novau ou bien n'en avons-nous frôlé que les bords? Toujours est-il que la Terre a été rencontrée par une comète, et qu'il n'en est résulté qu'un spectacle magnifique, sans dommage pour personne.

Voilà, ce me semble, de quoi nous familiariser avec ces astres barbus, chevelus, qui faisaient trembler si fort nos ancêtres et ne causent plus aujourd'hui qu'un sentiment d'admiration mêlé de curiosité.

A. Guillemin.