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AUBÉPINE.

Est-il vrai ?

BELAZOR.

Plus un radis dans la maison !

AUBÉPINE.

Ô joie !

BELAZOR.

J’ai bu un bouillon, quoi !

AUBÉPINE.

N’est-ce pas… fol espoir ! êtes-vous bien ruiné sans ressource ?

BELAZOR.

Lessive complète. Et devine un peu qui est-ce qui m’a mis dans le bœuf ?… Larfaillou.

AUBÉPINE.

Lui !… Merci, mon Dieu !

LARFAILLOU.

C’est le cri de la nature ! Bon vieillard, daignez m’accorder quelques instants d’audience. Après avoir mûrement réfléchi sur l’inégalité des conditions, j’ai reconnu que le meilleur moyen d’éteindre la misère partout où elle exerce ses rigueurs, et spécialement dans les classes pauvres, serait sans contredit de marier les hommes les plus riches avec les femmes les plus indigentes, et réciproquement. En conséquence, j’ai l’honneur de vous demander la main de mademoiselle votre fille.

AUBÉPINE, dans les bras de Larfaillou.

À lui ! je serais à lui !

BELAZOR.

As-tu fini ! quand je te dis que ça ne se peut pas. (À Larfaillou.) Elle est encore en pension.

LARFAILLOU.

Retirez-la, et je vous en ferai une, de pension, ô mon respectable beau-père !

BELAZOR.

Mais elle n’a que quinze ans.

LARFAILLOU.

Dans vingt années d’ici, elle en aura bien davantage.

BELAZOR.

Tu crois, mon p’tit gengendre ? (Il lui tape sur le ventre.)

LARFAILLOU.

Homme mal mis, rétrogradez ! et laissez la jeune fille se prononcer.