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orteil des autres doigts, lui font des pieds fourchus. Debout, à demi nu, avec ses bras de lutteur et ses mollets ronds, il ressemble à un faune d’Extrême-Orient. Il guette de son œil dur et luisant un départ qui rende une place disponible et brusquement, l’ayant trouvée, il se ramasse et s’endort.

Une femme entre avec une ombrelle large comme un parachute et qu’elle referme aussitôt d’un petit coup sec. Elle paraît grande et porte, en dépit du soleil, des patins de pluie. Elle se déchausse et soudain devient une naine : ses patins ont quinze centimètres.

En face de moi, un voyageur en complet veston se déshabille. Personne ne semble y faire attention, mais son exemple est contagieux : plusieurs Japonais quittent leur complet et, avec une expression de béatitude, leurs chaussures. J’imagine en effet, que ce qui doit le plus les faire souffrir, ce sont les souliers. Pendant quatre mille ans ils n’en ont point portés et c’est seulement depuis soixante ans qu’ils les endurent. Leurs pieds ne sont pas faits comme les nôtres : ils sont adroits comme des mains, ils sont prenants. J’ai vu vingt fois, dans les maisons de thé ou ailleurs,