Page:Le dernier des Trencavels 2 Reboul Henri.djvu/86

Cette page a été validée par deux contributeurs.
72
LE DERNIER

agité par la crainte ou par l’espérance.

Il se promenait à grands pas, puis s’asseyait, et, prenant sa viole dont il modérait les sons que le silence de la nuit aurait rendus trop bruyans, il fredonnait entre ses lèvres les derniers chants que l’amour lui avait inspirés.

« Quand Dieu, » disait-il, « fit Adam maître du monde et roi de tous les êtres vivans, Adam, se trouvant seul de son espèce, séchait d’ennui.

« Dieu lui donna une compagne, et il commença dès-lors à vivre en sentant qu’il aimait.

« Malheur à celui qui vit seul, et se trouve réduit à n’aimer que lui-même. Que peut-il recevoir celui qui n’a rien à donner ?

« Rien ne plaisait à Adam dans ce jardin paré de tous les trésors célestes. Il n’y voyait rien de beau, n’ayant personne à qui le dire.

« Tous les objets s’embellirent aux yeux, d’Adam quand il put les voir avec Ève ; mais le plus beau de tous, c’était Ève elle-même.