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sont appelées à vivre, et qu’on semble avoir muselées à plaisir afin qu’elles puissent plus sûrement servir de pâture au crime toujours impuni de la séduction.

Cependant, il faut l’avouer, nous ne sommes plus au temps où l’épithète de femme bel-esprit, n’était qu’une sanglante raillerie.

Molière, ce grand peintre de mœurs, a stigmatisé, dans la comédie des Femmes savantes, celles qu’on appelait alors improprement de ce nom.

Molière avait raison dans le 17me siècle : il a saisi avec bonheur un des ridicules de l’époque, mais autres temps, autres mœurs ; ces épigrammes contre le sexe sont passées de mode dans la bonne compagnie, et d’ailleurs ne conviendraient plus à notre civilisation avancée ; car, depuis ce temps les femmes ont réellement progressé ; beaucoup d’entr’elles sont instruites sans être pédantes ; elles ont prouvé qu’elles étaient capables d’aborder la poésie, de se livrer à la littérature sans tomber dans le pathos et l’affectation des Belise du siècle passé.

Pourtant, il serait à désirer que toutes voulussent faire justice de cette prévention fâcheuse, survivant encore dans un certain monde contre les personnes du sexe qui écrivent ; elles le pourraient facilement en protégeant de leur approbation active les femmes qui se livrent à ce genre de travail, et ce serait là un grand progrès ; car, lorsqu’elles comprendront généralement le besoin de se prêter un mutuel appui, et qu’elles mettront celle maxime en pratique, les femmes auront fait un pas immense dans la route épineuse qu’elles doivent parcourir avant d’arriver à cette vie d’amélioration qui sera un jour le fruit de leurs courageux efforts.

Louise Maignaud.