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nées, était sinon infirme au moins dans un état de faiblesse et de décrépitude qui ne lui permettait plus le même genre d’existence. Elle filait encore, et le produit de cette occupation, joint à de légers secours que de tems en tems lui envoyaient ses anciens maîtres, l’empêchaient seuls d’endurer les privations et la misère dont elle avait préservé la vie d’un orphelin.

Vers la fin de l’été de la quatrième année, comme on allait entrer dans cette saison où la nature attristée semble se couvrir d’un voile de deuil, où la feuille jaunie se détache de la branche qui l’a nourrie et vient couvrir la terre ; où l’homme que le souffle de la mort menace depuis quelque tems, succombe comme la plante sous l’influence de cette époque où règne la destruction, vers le commencement de l’automne, dis-je, la bonne vieille se sentit plus affaiblie, plus souffrante encore que de coutume, et quelque chose lui annonçant sa fin prochaine, elle écrivit à ses maîtres : leur réponse ne se fit pas attendre ; la voici telle que Madeleine la lut à sa grande satisfaction.

« Vos désirs seront remplis, ma bonne et chère Madeleine ; l’œuvre que vous avez commencée avec tant de générosité, que vous avez continuée avec tant de persévérance et de courage, ne restera point inachevée et imparfaite. Le dernier sacrifice que vous vous imposez, pour le bonheur de votre enfant, met le comble à votre désintéressement, et doit vous acquérir à jamais des droits à sa profonde reconnaissance, comme à l’estime de tous les honnêtes gens. Il va vous quitter ; vous quitter bientôt ma pauvre Madeleine ; mais, selon vos désirs, ce sera pour commencer l’état auquel vous le destinez, et qui vous coûte depuis si long-temps de continuels sacrifices. Je viens