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ligne des douaniers établie sur la frontière est étendue, mais les places en sont presque toutes données à de vieux militaires, en sorte que les gens du pays en sont frustrés. La misère se fait sentir doublement à cause du grand nombre d’enfans qu’il y a dans chaque famille ; il n’est pas rare d’en voir dix, et même douze, appartenir à la même mère.

Affligée de tant de misère, Madeleine conçut le généreux projet de se charger de tous les enfans pauvres de la ville, de les élever, de leur apprendre à confectionner de petits ouvrages qui les missent à même d’amasser quelque argent. Son projet, une fois arrêté, elle le mit à exécution, la bonne sœur ! Elle loua une salle vaste et saine ; elle y fit placer des tables et des bancs, et depuis ce jour, elle va chaque matin, frappant de porte en porte, chercher ces pauvres petites créatures qui arrivent, le sourire sur les lèvres et la joie au cœur, exprimer leur amour et leur reconnaissance à leur bienfaitrice.

Lorsque sa ronde est achevée, elle reprend le chemin du logis, conduisant les plus faibles par la main, et veillant sur les autres ; tous marchent avec ordre et sans bruit, heureux qu’ils sont d’obtenir l’approbation de leur maîtresse. Arrivés dans la grande classe, ils se mettent à l’ouvrage et témoignent par leur application la crainte qu’ils ont de fâcher leur bienfaitrice.

Lorsque vient l’heure du déjeûner. C’est encore sœur Madeleine qui se charge d’y pourvoir, c’est elle qui distribue de bonnes et grosses soupes ; c’est elle qui, l’hiver, donne des sabots à qui n’en a pas, un habit chaud à qui est mal vêtu ; et elle fait cela avec tant d’affection, elle sait si bien le langage qui convient à ces jeunes cœurs, que toujours ces riantes et fraîches figures la remercient de la voix et du regard. Il faut qu’elle assiste aux