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LE BATAILLON DE CYTHÈRE

et attrayants, des monstres repoussants, à l’haleine empoisonnée d’alcool, à la voix rauque, aux yeux chassieux, aux mains tremblantes… Que deviennent-ils ?

Le matin aux portes des casernes, des restaurants charitables, des maisons signalées comme distribuant le sou quotidien ou hebdomadaire, vous verrez une longue queue de mendiants, misérables, loqueteux, frissonnants sous le gel qui mord leur peau mal abritée par des haillons sans forme ni couleur ; ils attendent… Et tout le jour ils vont et viennent, déambulent à travers l’immense ville, courant d’une maison à l’autre, parfois arrivant trop tard, l’heure est passée !… Alors les yeux pleins de larmes, le dos voûté, les jambes cassées par la fatigue des longues courses, ils s’en vont ; dans un cabas ils traînent tout ce qui constitue leur avoir : de vieilles croûtes qu’une charitable ménagère qui n’a pas de chien à nourrir leur réserve, des choses pourries glanées sur les tas, le matin, aux Halles, parfois un sou… Le soir, les dessous de ponts, les carrières, tout ce qui est trou habitable reçoit son hôte… Et le sommeil clôt leur paupière… Rêvent-elles aux splendeurs passées, les pauvres travailleuses de l’amour ?… Quels beaux rêves alors !

VIII

L’ÉTRANGE ET L’ÉTRANGER — REPEUPLONS ! REPEUPLONS

L’exotisme est fort prisé par la clientèle des femmes galantes, l’Exposition universelle de 1900 en est la