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LE BATAILLON DE CYTHÈRE

geant, la prenant adroitement, elle ferait de belles funérailles à l’enfant, et s’il était chargé de les organiser, il pourrait y retrouver un peu de ce que cette mort lui faisait perdre ; il mit un temps convenable et, posant sa main sur l’épaule de la mère qui pleurait toujours, agenouillée maintenant au chevet du lit :

— Je conçois que vous éprouviez une grande douleur, Madame, mais vous devez aussi songer à vous. Ne vous exaltez pas, songez qu’il va vous falloir encore bien du courage… Allons, venez.

Il la prit par les bras, la souleva, la mit sur ses pieds, l’entraîna hors de la salle funèbre.

Ils traversèrent la grande cour, entrèrent dans le parloir où pétillait un feu maigre.

— Je vous attendais d’heure en heure — commença le bonhomme, les yeux fixés sur la lampe qui charbonnait, tout à son idée qu’il s’agissait de faire glisser délicatement à la mère au cœur endolori — mais le retard qu’a subi la lettre m’explique l’heure tardive de votre arrivée. Croyez, Madame, que rien n’a été épargné pour préserver la vie du pauvre enfant…

La mère sanglota.

— … Malheureusement, les décrets de la Providence… ce qui est écrit là-haut…

Il s’embrouillait ; trouvant sa phrase mal commencée, il la reprit.

— Écoutez-moi, madame : certes, votre douleur est légitime, mais il faut penser au présent ; que comptez-vous faire ? Elle le regarda les yeux troubles, noyés de larmes, sans comprendre.