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Le uoyage des Princes


vouloit pas bien luy donner encor vne preuue de ſa dexterité, ſuiuant les meſmes conditions de tātoſt, à quoy s’eſtant hūblement ſoubmiſe, la partie fut arreſtee au lendemain, & la belle fut conduite en ſa chambre en ſon particulier. Il y auoit en la court du Palais l’effigie d’vn des anceſtres du Roy, ayant vn ſceptre en la main : Roſolphe cōmanda qu’on oſtaſt ce ſceptre, & que ſur la main on miſt vne orenge, puis l’heure venuë, il la monſtra à Feriſtee, luy diſant que ſi elle pouuoit ſi biē tirer, qu’elle oſtaſt ceſte orenge, & la remiſt ſans qu’elle touchaſt à terre, qu’il luy accorderoit ce qu’elle auoit demandé. Elle luy reſpond auec tout reſpect, qu’elle eſtoit preſte d’effectuer ce qu’il auoit propoſé, ſi luy-meſme qui eſtoit l’vnique entre les accomplis, en venoit à chef. Le Roy qui auoit premedité ſon affaire eſleut la fleſche faicte expres, & tira ſi proportionnément, qu’il enleua l’orenge & la fleſche qui la trauerſoit, cheut plantee en terre, ayant l’orenge pres l’empanage puis il prit la fleſche, & pouſſant l’orenge au bout, tira en l’aër auec telle raiſon, que la fleſche s’eſtant tournee, vint tomber le fer dans l’anneau que faiſoit la main my-cloſe, & laiſſant l’orenge deſſus, vint ſeule par ſa peſanteur choir perpendiculairement en terre ſous la main de la figure. Ceux qui auoient admiré les coups faicts en l’obſcurité, s’eſmerueillerent encore plus de ceux-cy, eſtimans qu’il n’y auoit plus d’inuentiō pour les effacer : Feriſtee ayāt conſideré ce qu’elle deuoit executer, choiſit entre les fleſchescelle que elle eſtimoit propre à ce qui ſe preſentoit : & ayāt l’arc en main ſe mit deſſous la figure, ordonnāt ſi