Page:Le Voyage des princes fortunez - Beroalde, 1610.pdf/65

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
32
Le uoyage des Princes


ſes ſuiects, & marqués en la paix dont il les faiſoit iouyr, tout rioit en ce beau pays, & le peuple cōtent de ſon bon Roy, n’auoit autre frayeur que de le perdre, toutesfois il y auoit eſperance que la perte ne ſeroit pas abſoluë, car il auoit vn fils bō, beau, ſage & vaillant, mais deſia vn peu aduancé en âge, & ne deſirant point eſtre ioinct à vne femme, à cauſe d’vne deſdaigneuſe opinion qu’il en auoit conceuë eſtimaut les femmes eſtre la ruine des cœurs, & le mariage le ſepulchre des viuans : & bien que le Roy ſon pere priſt peine de le diuertir pour faire changer ceſte opinion, ſi ne pouuoit-il y entendre, par ce que ſon courage n’y eſtoit pas enclin. Or comme toutes rencōtres ont leur tēps, il aduint vn ſoir que ce Prince eſtant en deuis auec les Dames qu’il frequentoit, plus pour monſtrer qu’il ſçauoit bien qu’il eſtoit fils d’vne femme, que pour plaiſir qu’il y prit. Vne ancienne de la compagnie qui auoit eſté ſa nourrice, ſe mit à diſcourir des beautez & perfections de Feriſee fille d’vn Gentilhomme du pays, laquelle elle exaltoit ſur toutes, meſme par deſſus les accomplies de la Court, où cette-cy ne hâtoit pas, pource que le pere la cognoiſſoit eſtre belle, & ne deſiroit point qu’elle fuſt occaſion de luy donner du trouble par la demande qu’il penſoit que bien toſt on luy en feroit contraire à ſa reſolution, & ainſi ne pourroit euiter les inimitiez de ceux qui la demanderoient, & ne la pourroient obtenir. Encor qu’il la retint de voir la Court, ſi ne laiſſoit-il de luy permettre toutes höneſtes & licites libertés, & meſme l’exercice de la chaſſe, dont elle ſe delectoit ſingulierement,


s’eſtant