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En vain ta main ridée est appuyée au manche
D’un balai qu’au bouleau jadis j’ai connu branche,
Tu prends des airs hagards qui ne sont pas d’ici,
Des aspects de sorcière et des tons de Gypsy ;
La folle du logis, ô ma vieille quémande,
D’un coup d’aile franchit la frontière normande
Et tu me sembles l’œuvre, en ce moment d’oubli,
Du fantasque Greco Théotocopuli.

Après tout, ce n’est pas une grande merveille,
Chère sœur, en cela je vous rends la pareille.
Ne m’avez-vous pas dit qu’un matin de grand vent,
D’Aslorga par le coche en Galice arrivant,
Devant l’horizon vert et la plaine agrandie
Vous poussâtes ce cri : Voilà ma Normandie !
Tout vous semblait normand, tout, jusqu’à ces trois gueux
Transis et résignés, loqueteux et rugueux,
Gentilshommes ayant vingt quartiers de paresse
Qui vous faisaient songer à ma vieille pauvresse.
Le vent avait fermé la porte ; le plus vieux
Trouvait le firmament sinistre et pluvieux.
Ayant jeûné la veille, il estimait la vie
Sans pain et sans soleil fort triste ; il eut envie
De crier au nuage : Ennuyeux appareil,
Maudit voile, ôte-toi de devant mon soleil.