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Qui, du bout nonchalant de leurs lèvres gourmandes
Tondent le gazon vert qui leur bat les genoux.

Pensez à moi là-bas, ici je pense à vous.
J’y pense et j’aperçois le long de la muraille,
Accroché tout en haut, ce panneau de bataille
Où, souillés, pèle-mèle, affolés, nus, ardents,
Chevaux et cavaliers, écume et sang aux dents,
Scandent avec leurs pieds sur le sable et l’argile,
L’hexamètre nombreux du poète Virgile.
Oubliant Salvator et le Louvre, je vois
Le Cid qui tue et. taille et défait les cinq rois ;
Sa Tizonade au poing, le vaillant don Rodrigue
Tranche le nœud gordien de sa sublime intrigue ;
Sarrasins, Navarrois, Maures et Castillans
Se chamaillent ; les forts bousculent les vaillants,
Les manteaux déchirés, les rouges draperies
S’agitent ; on se prend au corps, dans leurs furies
Les ongles et les dents grincent contre le fer
Le glaive, ivre de sang, s’abreuve dans la chair
Et l’horizon blafard darde à travers ses voiles
« Cette sombre clarté qui tombe des étoiles. »

Ô bête Jacqueresse, idiote, est-ce toi ?
En vain je te vis peindre et poser devant moi,