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Craignait-il donc de voir, cet homme universel,
Ton épice masquer la saveur de son sel ?
Voltaire, dont la prose est un feu d’artifice,
Qui d’un petit éclair ne fait le sacrifice,
Brille, éclate, éblouit en bouquets menaçants
Et lance des pétards aux jambes des passants,
En vers semble changer de tactique et d’escrime :
À peine paraît-il se servir de la Rime,
Il se rit de Piron et des oiseaux siffleurs,
Hume à plein nez l’encens et marche sur les fleurs.
Pauvre rime vieillotte, en tes coiffes de duègne,
Je comprends qu’un sultan si choyé te dédaigne,
Mais pourquoi de son ongle arrogant et subtil
Laharpe fait-il rage et t’égratigne-t-il ?
— On le sait, c’est, hélas ! à cause de Voltaire.
Ô critique, critique, ô sacerdoce austère !
Les plus purs donnent donc le spectacle odieux
Des accommodements faits avec les faux dieux ?

Un seul homme, en ce temps d’allures impolies,
Comme au temps de Marot, fit pour toi des folies :
Dans les sentiers battus il marchait en vainqueur
En te donnant son bras et sa plume et son cœur ;
Il te trouvait toujours accorte et serviable,
Et sembiait croire encore à ta beauté du diable ;