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Rime, ne suis-je pas ton maître et ton disciple ?
Ne sais-je pas par cœur ton histoire multiple ?
C’est en ce rythme austère, exact et consacré,
Que, pour te faire honneur, je la raconterai.

Nous viens-tu du progrès ou de la décadence ?
Le mètre ancien vaut-il ta naïve cadence?
Ton père était-il Grec, Romain, Gaulois ou Franc ?
— Père et mère inconnus, Française au demeurant,
Dès ton berceau tu fus l’ornement des poèmes ;
Sage avec les docteurs, folle avec les bohèmes,
Croquant la pomme et l’ail et passant tour à tour
De la chanson de geste à la chanson d’amour ;
Parfois enfant gâté, parfois enfant terrible,
Semant le sable et l’or sans les passer au crible.
Ô jours doux et charmants de ta jeune saison,
Où nul ne te grondait au nom de la Raison !

Ô Rime, étais-tu leste et pimpante et coquette,
Lorsque Clément Marot entreprit ta conquête !
Et que de fois pour toi notre gentil Clément
Laissa la Raison seule en son lit inclément !
Tout poète, Marot, excuse ta folie,
Tant la soubrette était agaçante et jolie ;
D’ailleurs, maître, tu n’eus qu’à marcher en vainqueur