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Habitants d’un hameau solitaire et lointain,
Avec nos deux paniers nous partions le matin ;
Nous déjeunions de l’un et nous goûtions de l’autre,
Ce n’était ni le tien, ni le mien, mais le nôtre ;
Nous nous disions : Cousin, cousine… au fond du cœur
Nous aimions mieux cela que d’être frère et sœur.

     C’était amitié pure et camaraderie,
Marie allait à Jean, Jean protégeait Marie
Et leurs bons petits cœurs battaient à l’unisson
Sans savoir s’ils étaient de fille ou de garçon.

     Mais quand la Marion qui sortit de chez elle
Paysanne, revint au hameau demoiselle,
Le pauvre Jean fut pris d’un éblouissement.
L’amour a réveillé l’amitié ; mais comment
Chez les amis d’hier pourra-t-il sans offense
Renouer le chaînon des privautés d’enfance !
L’un espère un peu trop, l’autre des jours passés
Ne se souvient, hélas ! peut-être pas assez.
L’esprit de Jean rayonne et son cœur a des ailes
Mais il fait gauchement la cour aux demoiselles.
Il sent au fond du cœur qu’il est aisé d’aimer,
Mais il ne trouve pas de mots pour l’exprimer.
Parfois il s’évertue à polir son langage,