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formes. Les autorités de Tomsk, gouverneur en tête, viennent conduire à bord un très influent personnage, M. Boutovski, sénateur, procureur général à Saint-Pétersbourg, en mission spéciale, chargé de l’inspection des cours et tribunaux dans les gouvernements de Tomsk et de Tobolsk ; il est accompagné de trois autres magistrats et d’un secrétaire particulier.

Tous les cinq parlent admirablement le français. Ils vont pour le moment à Tobolsk, où ils doivent rester quelques jours, ce qui ne laisse pas de les effrayer.

La rivière Tom, qu peut avoir 200 mètres de large, roule des eaux pres- que aussi limpides que l’Angara. À une grande profondeur on peut voir les poissons se jouer sur le sable. Les rives manquent d’intérêt et le pays est peu accidenté. La navigation paraît difficile, car à plusieurs reprises nous modérons notre allure, passant d’une rive à l’autre. En peu d’heures nous arrivons à l’Ob et nous prenons possession de notre cabine sur le Kosakovski.

Ce vapeur ressemble beaucoup au Mouravief, mais il est plus grand : même entassement de passagers sur l’arrière, même promiscuité qui nous paraît si étrange.

Aux premières il n’y a que les magistrats et nous. Nos cabines sont dans la cale. Il est impossible de se faire une idée de l’humidité qui y règne : humidité singulière, car les cabines sont spacieuses.

Le service est bien fait, et la cuisine bonne. Les repas sont servis à heure fixe, et quand ils sont terminés on vous apporte l’addition, comme dans un restaurant.

Nous fournissons notre thé et notre sucre : nous n’avons droit qu’à l’eau bouillante. Nous mangeons d’excellent poisson. Le sterlet surtout est délicieux, bien meilleur, à notre avis, que celui de la Volga, pourtant si renommé.

BERCEAU SIBÉRIEN[1] (PAGE 225).

Il y a à bord une blanchisseuse : il y en avait une également sur le Yermak ; mais, n’ayant plus de linge, nous n’avons pas besoin de ses services.

Que dire de la navigation sur l’Ob, sur cet énorme fleuve, large parfois de plusieurs kilomètres, dont les rives basses souvent inondées, couvertes d’une herbe maigre, donnent l’idée d’un immense marais ? Nous sommes dans la partie la moins intéressante du voyage, qui nous paraît d’autant plus triste et monotone que nous avons encore présent à l’esprit le souvenir de ces merveilleux paysages de l’Amour, toujours si variés, Si pittoresques.

Nous marchons vers le nord et nous voyons peu à peu la végétation devenir plus maigre, les arbres de plus en

  1. Dessin d’A. Paris, gravé par Bazin, d’après un croquis.