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PALAIS BOUTINE À NERTCHINSK[1] (PAGE 198).


DE PÉKIN À PARIS[2],

LA CORÉE — L’AMOUR ET LA SIBÉRIE,
PAR M. CHARLES VAPEREAU.


XVII

Stretinsk.



Il y a une jetée à Stretinsk, la foule s’y presse. Au premier rang se trouve le colonel qui commande la garnison, entouré de ses officiers. À peine avons-nous établi les communications avec la terre qu’il monte à bord, et vient très aimablement m’annoncer que par ordre du gouverneur général de la Transbaïkalie il nous a fait préparer des chambres au Vauxhall ; il ajoute que l’ataman des cosaques, qu’il me présente, a ordre de rester jour et nuit à ma disposition ; puis il me remet un ordre du gouverneur général à tous les maîtres de poste d’avoir à me fournir des chevaux sans le moindre retard, en réquisitionnant, s’il en est besoin, ceux des paysans.

DIVINITÉ RELIGIEUSE BOURIATE[3] (PAGE 206).

Au Vauxhall nous sommes aussi bien installés qu’on peut l’être dans un hôtel, si l’on n’a pas la luxueuse habitude de coucher dans un lit et de se servir de draps. Un monsieur s’avance et me dit : « Permettez à un compatriote de vous souhaiter la bienvenue ». Fort surpris de trouver un Français à Stretinsk, j’apprends qu’il se nomme X…, qu’il est en Sibérie depuis une vingtaine d’années, et au service du gouvernement russe. Sa résidence est Tchita, mais, profitant d’un congé, il est venu voir des amis à Stretinsk.

Puis M. Mikoulitch, exilé polonais, propriétaire de l’hôtel, qui parle très convenablement notre langue, me présente M. Choustof, l’agent de M. Cheveleff, qui m’annonce qu’il m’a acheté pour la somme de 325 roubles le plus beau tarantass qui ait jamais paru à Stretinsk, fabriqué à Kazan, absolument neuf, ni trop grand, ni trop petit : juste ce qu’il nous faut.

Allons voir cette merveille : elle est dans la rue, à la porte de l’hôtel, avec une douzaine d’autres qui attendent des acquéreurs.

Je dois dire que notre tarantass brille en effet d’un rare éclat au milieu des horreurs qui l’entourent. On n’a rien exagéré, et les Kapoustine, qui m’avaient tant parlé de l’importance d’un bon et solide véhicule, ne cessent de pousser des cris d’admiration : « Sehr gut, ganz qut ! » Leur enthousiasme me fait plaisir, et ce qui me rassure le plus, c’est de voir dans quel équipage ils se disposent à partir pour Tomsk. Leurs roues sont gondolées, deux ou trois d’entre elles ont été raccommodées avec des attaches. Ils ont trem-

  1. Dessin de Taylor, gravé par Marynard.
  2. Suite. — Voyez t. LXVII, p. 177, 193, 209, 225, 241 et 257.
  3. Gravure de Bazin, d’après une photographie.