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2 : LE TOUR DU MONDE.

L’ancien et illustre gouverneur du Sénégal m’encouragea à persévérer dans mon idée, et un an après, à la fin dé 1886, grâce à son appui, M. Flourens, ministre des affaires étrangères, et M. de la Porte, sous-secrétaire d’État aux colonies, me confièrent l’importante reconnaissance géographique de la boucle du Niger et la mission politique de relier nos établissements du Soudan français au golfe de Guinée.

Ce n’est pas chose facile que d’organiser une mission qui doit durer deux ans au minimum.

Je voulais marcher seul, avec le personnel le moins nombreux possible. Pour cela, il fallait me constituer une pacotille peu volumineuse, où cependant toutes les

industries seraient à peu près représentées. Dans ces :

régions, l’échange direct n’existe pas : lorsqu’on veut faire un achat, 1l faut transformer les objets de la pacotille en monnaie courante acceptée dans le pays, puis acheter l’ objet qu’on désire.

Pour mener à bien ma mission, deux routes s’offraient à moi : celle du Soudan français et celle du golfe de Guinée. Voici les raisons qui m’ont fait opter pour la voie Sénégal-Niger-Bammako :

1° Impossibilité de se porter à Assinie ou Grand-Bassam autrement que par des vapeurs anglais, et inconvénient d’éveiller ainsi l’attention sur mes projets de pénétration vers une région convoitée depuis longtemps par l’Angleterre ;

2 Insuccès constant des explorations faites vers li intérieur en partant du golfe de Guinée ;

3° Renseignements Lrop vagues sur es voies de pénétration vers l’intérieur ;

Le Difficulté de recruter une escorte de gens connus et dévoués ;

5 Impossibihté, en partant du golfe de Guinée, defaire usage d’animaux porteurs, et obligation d’avoir.

recours à des noirs, qui, s’ils se révoltaient ou se mettalent en grève, me forceraient à rebrousser chemin : 6° Avantage, en traversant le Soudan français, de pouvoir emmener des hommes dévoués et dont je connaïssais les langues et dialectes. Enfin, la traversée du Soudan français et des États

de Samory semblait surtout avoir cet avantage de marcher longtemps et assez loin vers l’intérieur sous la

protection de chefs avec lesquels noûs soimIhes en relation.

Le 18 février 1887, tous mes achats étaient términés, et le 20 je m ’embarquais à Bordeaux, sur le päquebot Ja Gironde, emportant avec-moi toutes mes provisions et marchandises. Le 28, j’étais à Dakar, où je ne-restai que le temps nécessaire au . transhordement de mes bagages. du quai au chemin de ler, et je partais pour Saint-Louis. Foi Foot et

Malgré toute la-häâte que j’avais de : me mettre en route, je dus rester à Saint-Loüis : -onze jours ; en celte saison, Où 11 n’y a presque-plus d’eau dans le fleuve, les départs ne sont pas fréquents. M. Genouille, gouvéineur. du Sénégal, fit tout ce qu’il était possible ; pour me rendre moins pénible mon voyage vers Kayes.-Sur.ses :


ordres, un chaland, muni d’une baraque en planches avec véranda, fut installé à mon intention. Il devait servir à ramener des malades à Saint-Louis, le cas échéant.

Le 12 mars au matin, je quittai donc Saint-Louis sur mon chaland, remorqué par le Médine, qui portait des approvisionnements el le courrier de France, J’emportais les vœux de réussite du gouverneur et ceux de nombreux amis qui étaient venus jusqu’au bateau me serrer Ja main.

Le 22 mars j’étais à Saldé, le 31 à Matam. Le mois d’avril amena des vents favorables ; ma toile de tente servait de vire (voile), comme disent les Ouolofs, et nous gagnions 1 à 2 milles par jour environ.

C’est dans la nuit du 4 au 5 avril qu’eut lieu la première tornade sèche ; le vent sévitavec violence, et notre chaland, mal mouillé, remonta le courant pendant environ 500 mètres. L’anere traïnant au fond de l’eau, je craignais de la voir s’empêtrer dans quelque bois mort. mais il n’en fut rien etce bain n’eut pas de suiles fàcheuses, |

Le 9 avril, après plusieurs tentatives pour franchir les bancs de Moudiéri, je dus y renoncer et me rendre par terre à Bakel.

Le lendemain M. Largeau, commandant du cercle de Bakel, eut l’amabilité d’envoyer de petites embarcations à Moudiéri pour y prendre mes bagages.

Secondé par les camarades en garnison au poste et les traitants de Bakel, j’acquis dix-huit ânes en échange d’armes et dé guinéet et j’engageai un peu de personnel.

Les tratants de Bakel sont, pour la plupart, des Ouolofs de Saint-Louis ; ils savent presque tous lire et

‘écrire. le’ frañçais ; un d’entre eux, Boly Katy, a même

fréquenté pendant quelque temps une institution à Bordeaux.- Les autres ont appris ce qu’ils savent à

l’école des otages de Saint-Louis, créée par le général

Faidherbe quand il était gouverneur du Sénégal. Leur

‘concours m’a été précieux. Ce sont eux qui m’ont fait

confectionner les petits sacs ({arfadé) qui servent de Bât, et brèler par leur personnel mes bagages à ke manière des ballots de gomme des Maures.

Is m ontinitiéi à mille petits détails utiles à connaître : je leur adresse ici tous mes remerciements, età mon ami Boly Katy en particulier.

Ce sont de’ bons Français, ils sé sont vaillamment battus lors de :l’attaque de Bakel par Mahmadou Lamine : quelques-uns d’entre eux ont reçu à cetle occasion des médailles d’honneur du ministre de la marine.

Arrivé à Médine le 29, j’étais prêt à me mettre en route cuelques jours après ; le commandant Monségur, commandant de Kayes,. m’avait facilité le recrutement de mon personnel en me cédant. tous les manœuvres qui me ‘convenaient et que. je choisis exclusivement parmi les’ individus originaires de la rive droite du

Niger et des pays mandé-

Le. colonel Galhieni, commandant supérieur du Soudan français, ne tarda pas à arriver à. Kayes. II me mit

-.1. Cotoñnade légère : teinte à l’indigo’ et fabriquée à Pondichérv :