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découvert de nombreux objets préhistoriques, aujourd’hui au musée de Mende.

Les Vignes. — Dessin de Vuillier, d’après nature.


Des Vignes au Rozier, la navigation, sans être le moins du monde périlleuse, est plus difficile, et il est nécessaire de prendre dans le village de véritables bateliers. Le Tarn est encombré d’énormes blocs de rochers, cachés parfois sous l’eau : on compte vingt-cinq rapides sur un parcours de 10 kilomètres, et deux de ces rapides sont de véritables petites cascades, enserrées entre des roches laissant à peine place à la largeur du bateau[1]. Avec les Gall ou tels autres bateliers expérimentés, cette descente « à la canadienne », ainsi que le dit Onésime Reclus, est un vrai plaisir ; on a l’émotion du danger et l’on ne court en réalité aucun risque.

Cette descente est même si attachante comme sport que l’on oublie de regarder le magnifique cadre du tableau, et je conseillerais vivement aux voyageurs qui voudraient bien voir cette partie du cagnon de descendre d’abord à pied au Rozier, puis de revenir aux Vignes par l’un des deux causses et alors, mais seulement alors, de faire la descente en bateau. Ces deux excursions se complètent l’une l’autre, et chacune d’elles est de haut goût. Il faut une heure trente minutes en bateau, ou deux heures à pied, pour arriver au Rozier. Aujourd’hui partons par le sentier ; demain ou après-demain nous partirons en barque. La route muletière longe la rive droite du Tarn, montant et descendant tour à tour au gré des rochers. Nous passons devant une jolie source et nous laissons à droite les lacets de la route qui escalade la muraille du causse et conduit à Saint-Rome, au Massegros, etc. La distance des Vignes à Saint-Rome est de 1 200 mètres à vol d’oiseau, sur 500 mètres de différence de niveau, rachetés par environ 6 kilomètres de route en lacets.

Au delà de quelques bandes de champs cultivés, nous longeons de grandes roches, souvent en surplomb. En contre-bas coule le Tarn, brillant sous le soleil ; plusieurs barques passent à nos pieds, les unes filant en aval, les autres remontant péniblement en amont ; l’une de celles-ci, manœuvrée par huit hommes, les uns tirant à la ligne dans le lit de la rivière, les autres maniant les gaffes, a grand’peine à franchir un rapide. S’il ne faut qu’une heure trente minutes à deux heures, selon l’état des eaux, pour descendre, il faut huit heures pour remonter.

  1. Les barques en usage des Vignes au Rozier sont moins larges de 50 centimètres que les barques de pêche employées en amont du pas de Soucy.