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roche. L’inondation de 1875, qui emporta tous les ponts du Tarn sauf ceux de Quézac et de Sainte-Énimie, bloqua les habitants du hameau, envahit leurs demeures, les mit en danger de mort. Depuis lors ils ont abandonné ces maisons construites sans toits, sous l’abri des roches, et aujourd’hui le hameau tombe en ruine.

Nous voici au milieu du cirque et nous tournons au sud, doublant l’énorme contrefort boisé et rocheux du causse Méjan qui s’enfonce comme un coin dans le rentrant des Baumes ; puis nous passons devant le hameau des Baumes-Basses, sa belle source et son couloir verdoyant, coupure de la muraille du causse de Sauveterre.

Vers le haut de ce couloir, un peu en amont, s’ouvrent les Baumes-Chaudes (vastes grottes dans lesquelles M. le docteur Prunières a fait de remarquables découvertes préhistoriques). Elles ont servi de sépulture à l’époque de la pierre polie ou, si l’on aime mieux, des dolmens. Les objets rares retirés de là par le savant anthropologiste formeraient un musée.

À peu de distance des Baumes-Basses, dans un petit cirque secondaire, se montre, dans un encorbellement de roche et plaquée contre la falaise rouge, une petite maison blanche ; c’est un lieu de pèlerinage, l’ermitage de Saint-Ilère, l’évêque de Mende qui, au septième siècle, consacra Sante-Énimie. Près de l’ermitage restauré se trouve, dans un creux de rocher, une petite source, dont l’eau est, au dire des pèlerins, souveraine contre les maladies d’yeux.

Saint-Ilère dépassé, nous voyons bientôt, assez loin devant nous, des talus hérissés de roches, de l’aspect le plus étrange, et peu à peu nous entendons comme le bruit d’une cascade ; les bateliers poussent la barque, accostent la rive droite : là toute navigation est interrompue ; nous sommes à la perte du Tarn, au pas de Soucy.

La perte du Tarn. — Dessin de Vuillier, d’après nature.


VI. Le pas de Soucy, la légende de Sainte-Énimie et les Vignes.


Je dis adieu à Justin Montginoux et je pars avec Fortuné Paradan. Un excellent petit chemin de chars, ouvert depuis 1880, circule à mi-côte au milieu d’un chaos grandiose aussi saisissant d’aspect que celui d’Héas dans les Pyrénées et plus étrange encore, grâce à la présence de l’Aiguille et de la Sourde, à la grande falaise de la Roche-Rouge.

En amont s’élèvent les grandes falaises du cirque des Baumes ; à côté de vous, sur la rive droite, l’énorme bloc de la Sourde ; sur la rive gauche, la belle muraille verticale de la Roche-Rouge, et plus loin, à mi-côte,