Guiard et MM. Béringer et Roche. C’est à ce puits, dont le nom même, comme toute la dernière partie de la route, est encore inconnu, qu’une insigne trahison amena le massacre des cinq vaillants et méritants ex- plorateurs. Le crime avait été médité par les Oulâd Sidi Ech-Cheïkh; la complicité de Ahîtarhen, chef su- prême du Ahaggar, et celle d’une partie de l’escorte paraît évidente. Le capitaine Dianous, M. Santin et les Arabes restés fidèles n'avaient plus qu’à chercher le salut dans la fuite; ils accomplirent leur retraite avec une célérité sans exemple, refaisant en douze marches forcées les dix-neuf ou vingt dernières mar- ches de la mission. Dans sa fuite le capitaine Dianous rencontra des Tédjéhé-Mellen, tributaires au titre re- ligieux des Oulâd Sidi Eech-Cheïkh ; ils lui offrirent des dattes mêlées des feuilles d’une jusquiame qui a la propriété de produire la folie avant de donner la mort. À la source d'Amdjid il fallut livrer un combat à des Touâreg quiavaient pris position sur la source; le capitaine Dianous et un soldat français tombèrent frappés à mort, et M. Santin succomba au poison ingéré la veille! Il restait encore un maréchal des logis; l’ex- pédition de secours envoyée de Warglâ a retrouvé son cadavre. La soif et la faim avaient eu raison du der- nier survivant de ce groupe de courageux Français!
VIII
Reposons-nous de ce tableau lugubre en nous re- portant aux efforts plus heureux de nos explorateurs au Sénégal et sur le haut Dhiôli-Ba, ou Niger. Tandis qu’une mission anglaise chargée de nouer des com- munications commerciales directes entre Serra Leone et le haut Dhiôli-Ba était retenue à Timbo, capitale du Foûta Dhiallon, le capitaine Galliéni, dont nous avons mentionné le;départ à la tête d’une mission française auprès d'Ahmadou, roi de Sêgou, est revenu à Bâkel Le 23 avril. Hésitant entre les conseils de la sagesse et des suggestions hostiles à notre in- fluence, le faible sultan Ahmadou avait longtemps retenu le capitaine Galhéni. Il a fini, cependant, par l'autoriser à revenir au Sénégal, et cet officier rap- porte des conventions passées avec tous les chefs du pays des Mandingues, entre le Dhiôli-Ba et Mour- goula, chef-lieu du pays de Birgo. Mais la convention peut-être la plus importante est le traité par lequel le roi Ahmadou accepte formellement le protectorat de la France, s'engage à maintenir la sécurité sur la route entre les postes français du Sénégal et sa capi- tale, où le gouvernement français aura un résident. Nous sommes donc fondés à dire aujourd’hui que l’in- fluence française vient de faire un grand pas dans la partie supérieure du bassin du Dhiôli-Ba, en même temps que dans la Tunisie.
IX
On se rappelle qu'une mission, commandée par le
LE TOUR DU MONDE.
lieutenant-colonel Borgnis-Desbordes, avait été chargée de reconnaître la partie orientale du bassin du Séné- gal, en vue de l'établissement de voies ferrées. Cette mission comprenait plusieurs officiers plus spéciale- ment chargés, sous les ordres du commandant Der- rien, d'étudier la géographie du pays. De Ba-Foülabé, où elle trouva un poste français occupé depuis Le mois d'août 1880, elle suivit le cours du Ba-Khoï au mi- lieu d’une riche contrée que les guerres d'El-Hädj (ou Alagui) Omar ont dépeuplée, et, Le 18 février 1881, elle arrivait à Kita (ou Makan-Diambougou), à cent quatre-vingts kilomètres seulement du Dhiôli-Ba. Cest là que le gouvernement du Sénégal établit un fort dont la construction était déjà avancée à la fin du mois de février, et qui doit appuyer solidement notre influence dans le pays. Le colonel Borgnis-Des- bordes ne perdit pas un instant pour châtier les ha- bitants de Goubanko, qui avaient fait cause commune avec ceux de Dio, lors de l’attaque opérée sur la mis- sion (ralliéni.
Quant à la brigade topographique, elle a jusqu'à la fin de l’expédition laborieusement exécuté des levés ct recueilli des informations. Elle a, en particu- lier, étudié sur place la question du lac Mandiri qu'on disait envoyer ses eaux, d’une part au Ba-Khoï et de l’autre au Ba-Oulé, Les officiers de cette brigade sont de retour en France. Ils ont été durement éprou- vés par les fièvres, mais nous savons qu’ils rapportent des informations aussi nombreuses que précises sur ce pays dont la connaissance est pour nous d’un si haut intérêt.
X
Une triste nouvelle nous arrivait dès le commence- ment de l’année. M. Lucereau, voyageur français, dont les efforts pour pénétrer dans l’intérieur du pays des Cômäli avaient échoué devant l’opposition d’Aboùû Beker, gouverneur de Zela’ (ou Zeïla’}, avait enfin réussi à partir de cette ville avec une caravane. A [a fin de l’été dernier, il arrivait à Adar ou Hèrèr; là notre compatriote M. Bardey lui fit le meilleur ac- cueil et le mit en mesure de s’organiser pour son voyage au Chawä. Vers le 1* octobre 1880, M. Lu- cereau, quittant Hèrèr, s’engageait dans le pays des Iitou, tribu des Orma ou Galla, qui entoure la ville. Au bout de six jours de marche, arrivé en un point situé vers 9° 80’ de latitude nord et 38° 30° de longi- tude est, ce malheureux explorateur a péri victime de la cruauté des Orma. ‘
AI
Après avoir établi près de Machogo, sur lOgowé, en un point qu'il nomma Francheville, une station où va s'établir M. Mizon, envoyé du Comité français
, Le .4 _ de l’Association internationale africaine, M. de Brazza presque seui s'était enfoncé dans le sud-est, résolu à atteindre le cours du Congo. Coupant plusieurs af-