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l’expression de « Bois-Brülés » employée pour désigner les métis issus de ces alliances, race de vigoureux chasseurs qui dès lors forment une population à part, et jouent un rôle important dans les conflits allumés par la rivalité des grandes compagnies commerciales du « Nord-Ouest » et de la « baie d’Hudson ».

C’est en 1783 que fut fondée à Montréal la Compagnie du Nord-Ouest. Une partie de ses actionnaires étaient Canadiens, d’autres Écossais, mais les derniers finirent bientôt par dominer dans le conseil d’administration. La Compagnie du Nord-Ouest déniait énergiquement à celle de la baie d’Hudson le droit d’étendre le monopole concédé par le roi Charles II au delà des limites, assez vagues du reste, que le traité d’Utrecht attribuait aux possessions anglaises. Ce fut pendant ces querelles entre compagnies, querelles souvent vidées à main armée à l’ombre des grands bois ou au milieu de la morne solitude des Prairies, qu’eut lieu un épisode dont j’aurai à reparler ailleurs, le combat des Sept-Chênes, — Seven Oaks, — livré le 19 juin 1816, dans lequel le gouverneur Semple, envoyé à la Rivière Rouge par lord Selkirk, alors directeur de la Compagnie de la baie d’Hudson, fut tué par un parti de gens de la Compagnie du Nord-Ouest, presque tous Bois-Brûlés français.

Mgr Taché et le P. Lacombe (voy. p. 261). — Dessin de E. Roujat, d’après une photographie.

En 1821, toutes les discussions cessèrent enfin par la fusion de deux compagnies rivales. Ainsi renforcée et reconstituée, l’ « honorable » Compagnie de la baie d’Hudson put exercer sa souveraineté pendant près d’un demi-siècle sur une portion du continent américain presque égale en surface à l’Europe entière.

Quant à la colonie agricole de la Rivière Rouge, — le Red River ou Selkirk Settlement des Anglais, — elle avait été fondée vers 1813 ou 1814 par lord Selkirk, qui y amena plusieurs familles de Highlanders expulsées des domaines de la duchesse de Sutherland, dans le nord de l’Écosse, par le clearing of estates, cette pratique aussi profitable que peu humaine employée successivement par tous les grands propriétaires britanniques, et qui consiste à livrer à l’élevage du bétail d’immenses espaces enlevés aux maigres cultures des pauvres tenanciers. La descendance de ces immigrants de la première heure occupe encore aujourd’hui la plus grande partie des paroisses qui s’étendent de la « fourche