travaillés en boule ou facettes, mais cotés à des prix exorbitants.
Les ouvrages qui rappellent le plus le travail de l’orfévrerie ont pour objet la décoration des armes des yakounines ; car ceux-ci font enrichir de toutes sortes d’ornements, d’un style essentiellement pacifique, la poignée, la garde et le fourreau de chacun de leurs deux sabres, ainsi que le manche en métal d’un couteau qu’ils introduisent dans une gaîne pratiquée au fourreau du plus petit. Ces ornements sont quelquefois des merveilles de gravure, de ciselure et d’alliage de métaux. On y emploie tour à tour l’or, l’argent, l’acier, le cuivre, le bronze, et une composition connue sous le nom de métal de Sawa, dont on fabrique aussi des règles à tirer des lignes, des presse-papier, des agrafes, des serrures et des portefeuilles.
Yedo est la ville du Japon
où l’on travaille le
mieux les métaux. Les
magasins de bronze de la
Cité sont au nombre des
intéressantes curiosités
indigènes. Quelques-uns
présentent l’aspect de
grands bazars, étalant à
côté des salles consacrées
Nœuds et broderies de soie.
aux bronzes tout ce qui
concerne la sellerie, c’est-à-dire,
outre la selle et le
harnais, les étriers, les
mors, les grelots, ainsi
que l’attirail même du cavalier,
y compris ses gantelets,
son casque, son
armure complète, tandis
que des compartiments
reculés sont réservés aux
articles de ménage, tels
que la quincaillerie et la
batterie de cuisine en fer,
en cuivre rouge ou jaune
et en étain. L’exposition capitale, celle des bronzes,
se fait surtout remarquer par les grands ouvrages de
style monumental, que l’on fabriques à l’usage du culte
bouddhiste. Ce sont, par exemple, des cloches richement
décorées d’ornements en relief ; des tambours
allongés reposant sur des chevalets ; de grosses boules
creuses et entaillées, faisant l’office de gongs, et des
plaques ou des triangles sonores, suspendus à des potences
de métal ; d’un autre côté, les vases qui doivent
orner le maître autel : les uns couronnés de plantes
de lotus exécutées en métal niellé, les autres destinés
à recevoir d’énormes bouquets de fleurs naturelles ;
ailleurs, les hauts candélabres en forme de pavillons à
toitures ornées de clochettes ; puis l’autel des parfums,
reposant sur un trépied et supportant un élégant
braséro à deux anses, surmonté d’un couvercle percé
de trous pour donner issue à la fumée ; enfin les statues
et les statuettes des saints, et les animaux sacrés,
tels que la cigogne, la grue, la tortue et le fantastique
chien de Corée, tenant sous l’une de ses pattes une
sphère évidée qui tourne sur elle-même.
Quant aux objets de moindre volume, ils sont en nombre si considérable, que je me borne à citer au hasard deux ou trois de ceux qui m’ont paru le plus dignes de remarque : ainsi, les encensoirs, les canettes pour l’offrande du saki, un petit sceptre sacré se terminant aux deux extrémités par une griffe à demi fermée, mystérieux instrument auquel on attache une vertu magique, et dont les prêtres se servent habituellement pour polir les grains de leur rosaire ; enfin et par-dessus tout, les chandeliers à une ou plusieurs branches, qui revêtent, pour la plupart, les formes bizarres ou gracieuses de figures fantastiques, d’élégants végétaux, de grands oiseaux de marais, et de petits enfants jouant avec des fleurs. Les branches de ces chandeliers sont munies de pointes, sur lesquelles on plante de hautes bougies de cire végétale, que l’on allume par le gros bout. Il y a d’ailleurs dans chaque temple bouddhiste au moins une lampe suspendue dont on a soin d’entretenir constamment la flamme. Quant aux lampes domestiques, façonnées en forme de coupes, ce sont ordinairement de simples veilleuses, que l’on allume dans de hautes cages de papier transparent ou sur un mince trépied de fer : la mèche de coton qui plonge dans l’huile, repose sur une couche de moelle de roseau.
Parmi les ustensiles de bronze des ménages japonais, l’on distingue des braséros, des aiguières et même des aquariums, d’un fort beau travail ; mais c’est, si je ne me trompe, dans les grands vases de salon, que l’art indigène atteint sa perfection. Ils ont quelquefois un mètre et demi de hauteur ; les uns sont d’une belle couleur jaune qui approche de l’éclat de l’or : on y déploie un grand luxe d’ornements en relief, dont les sujets sont tirés de la mythologie ; les autres, d’un style plus sobre et plus sévère, étalent sur une surface unie et d’une belle teinte noire de légers dessins de fleurs, d’oiseaux et d’arabesques en fil d’argent incrusté