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donc plus qu’à choisir entre le suicide ou l’abjection la plus infâme.

Voici justement un petit fait qui date de quelques jours, et dont on parle autour de moi. Le Guicowar ou prince de Guzerate, gentleman très-civilisé, avait des vues sur une jolie personne mariée à un de ses officiers, un homme estimé. Il veut les forcer à divorcer afin d’épouser la femme. À sa grande surprise, ils ne paraissent pas fiers de l’honneur qu’on leur fait, et résistent résolument. Jetés en prison, ils ne sont que plus fermes dans leur légitime affection. Le Guicowar furieux accuse le mari d’avoir usurpé un petit domaine appartenant à l’État (il paraît que c’était faux), le fait amener dans sa cour et le fait broyer sous le pied d’un de ces éléphants qu’on appelle dans l’Inde éléphants exécuteurs. La femme a le nez coupé.


Temple hindou de Sarwar (ouest de l’Indus). — Dessin de H. Clerget d’après une photographie.

Jusque-là rien que de très-ordinaire en Orient, bien que cela se fût passé à la barbe du résident anglais : mais Baroda, capitale du Guicowar, est à deux pas de diverses villes anglaises, et voilà que cette maudite presse anglaise qui se mêle de tout ce qui la regarde se met à tonner contre l’assassinat de Baroda, déclare que ces faits sont une honte pour le gouvernement anglais qui tolère l’existence de pareils tyranneaux, et finit par demander l’annexion pure et simple des États de l’assassin. Dieu le veuille ! mais on n’en fera malheureusement rien, j’ose le jurer.

Omerkote, 30 mai. — On continue à se battre du côté de Bhawulpore. Voici ce que j’apprends de droite et de gauche. Il y a déjà eu ce printemps une insurrection : mais le rajah a payé des Beloutchis (ce sont les Suisses de ce pays-ci) et a écrasé les conjurés.